Les dernières fusillades qui ont eu lieu en début du mois d’août, à El Paso et Dayton, ont remis sur le tapis le débat sur les potentielles causes de la croissance des comportements violents. L’une des causes pointées du doigt concerne la santé mentale des tireurs. Pour y remédier, une nouvelle initiative, visant à mettre au point un moyen d'identifier les premiers signes de changements chez les personnes atteintes d'une maladie mentale qui pourraient conduire à un comportement violent, a été mise sur la table à la Maison-Blanche, a rapporté The Washington Post le jeudi dernier.
Selon les partisans du nouveau plan, c’est un moyen pour le président Trump de faire progresser le contrôle des armes à feu à la suite des récentes fusillades de masse, alors que les efforts semblent s'essouffler, pour imposer des restrictions plus sévères, comme la vérification des antécédents sur les achats d'armes.
La proposition présentée à la Maison-Blanche, par la Fondation Suzanne Wright, s'inscrit dans le cadre d'une initiative plus vaste visant à créer un nouvel organisme appelé Health Advanced Research Projects Agency (HARPA) – Agence pour les projets de recherche avancée de santé –, qui ferait partie du Département de la Santé et des Services sociaux des États-Unis. Son directeur serait nommé par le président, et l'agence aurait un budget séparé, selon le journal qui cite trois personnes anonymes ayant connaissance des conversations autour du plan.
Selon le journal, le concept a été présenté par la Fondation Suzanne Wright et discuté pour la première fois par des fonctionnaires du Conseil de politique intérieure et des cadres supérieurs de la Maison-Blanche en juin 2017. Mais ce sont les dernières fusillades de masse, qui ont fait plus d’une trentaine de morts au cours d’un seul week-end, qui ont remis l'idée au goût du jour. La semaine dernière, la Fondation a proposé à la Maison-Blanche que la HARPA inclue un projet « Safe Home » - « Enrayer les événements mortels aberrants en aidant à surmonter les extrêmes mentaux ».
Selon Geoffrey Ling, conseiller scientifique principal de l'HARPA et directeur fondateur de l'Office des technologies biologiques du DARPA, la tentative d'utiliser des données bénévoles pour identifier les « signes neurocomportementaux » d'une « personne se dirigeant vers un acte explosif violent » serait un projet de quatre ans dont le coût serait de 40 à 60 millions de dollars, a rapporté le journal. Au cours d’une interview, M. Ling a dit :
« Tout le monde serait volontaire ». « Nous n'inventons pas de nouvelles sciences ici. Nous l'analysons pour développer de nouvelles approches », a-t-il indiqué avant d’ajoute que « Cela va devoir être fait avec rigueur scientifique ».
La série de fusillades aux Etats-Unis a déclenché le projet HARPA
Selon un précédent rapport du Washington Post, le président a déclaré qu'il pensait que les malades mentaux étaient les principaux responsables de la vague de fusillades de masse aux États-Unis. Et cette proposition est susceptible d'être bien accueillie par les républicains et les militants des droits des armes à feu qui ont soutenu la même chose.
« Nous examinons toute la question des armes à feu ». « Je veux que les gens se souviennent des mots "maladie mentale". Ces personnes sont mentalement malades... . Je pense que nous devons recommencer à bâtir des institutions parce que, vous savez, si vous regardez les années 60 et 70, beaucoup de ces institutions ont été fermées », a dit Trump le 15 août.
Bien que Trump n'ait pas proposé d'importante mesure législative sur le contrôle des armes à feu, au cours de son allocution officielle prononcée suite à la fusillade d'El Paso et de celle de Dayton, en Ohio, il a déclaré que le pays doit renforcer ses lois sur la santé mentale. « Aujourd'hui, j'ordonne également au ministère de la Justice de proposer une législation garantissant que ceux qui commettent des crimes haineux et des meurtres de masse soient passibles de la peine de mort et que cette peine capitale soit appliquée rapidement et avec détermination... », avait dit le président américain.
Mais, selon le journal, il y a beaucoup de chercheurs et d'experts en santé mentale qui croient que la santé mentale et la violence armée ne sont pas nécessairement liées. Même si la maladie mentale peut parfois être un facteur dans de tels actes de violence, disent les experts, elle est rarement un indicateur. En effet, la plupart des études montrent que pas plus d'un quart des tireurs de masse ont une maladie mentale diagnostiquée. Plutôt, les attributs les plus couramment partagés des tireurs de masse comprennent un fort sentiment de rancune, un désir de notoriété, une obsession pour les précédents tireurs, des antécédents de violence familiale, le narcissisme et l'accès aux armes à feu, a rapporté le journal.
La proposition de création d’HARPA bien accueillie par Trump
Selon une personne anonyme au courant des discussions, Trump a réagi « très positivement » à la proposition de la HARPA et a été « acquis au concept ». Par ailleurs, l’idée aurait enchanté la Maison-Blanche chaque fois qu’elle a été soulevée, selon la personne.
« Chaque fois que cette question a été soulevée à la Maison-Blanche, même jusqu'au niveau présidentiel, elle a été très bien accueillie », a-t-elle déclaré. « La HARPA est l'équivalent de la DARPA en matière de soins de santé, et c'est un grand projet de legs pour le président, un projet qu'il est particulièrement bien placé pour mener à bien », a-t-il ajouté.
Selon cette personne au courant des discussions, Trump pourrait bénéficier de diverses façons en soutenant un projet comme HARPA à l'heure actuelle. En effet, « Il ne fait aucun doute que le fait d'aborder cette question aide le président à régler deux questions sur lesquelles il n'a pas encore obtenu de réel succès : l'une concerne les soins de santé et l'autre la violence armée », a dit la personne.
Selon le journal, Bob Wright, qui a fondé la Fondation Suzanne Wright et qui entretient une relation personnelle étroite avec M. Trump, considère Ivanka Trump, femme politique et fille du président, comme la championne la plus efficace de la proposition et l'a déjà informée sur la HARPA elle-même, a dit M. Wright. Un fonctionnaire qui connaissait bien les conversations a déclaré :
« Ce serait parfait pour elle de le faire - nous avons besoin de quelqu'un avec un peu de puissance - quelqu'un comme elle qui le conduit. ... Cela pouvait se faire ». « Nous serions en mesure de mettre toutes les ressources du gouvernement fédéral, des plus hauts niveaux de la communauté scientifique, pour dire : " C'est ainsi que les personnes aux prises avec ces problèmes devraient être traitées et avoir un accès limité aux armes à feu " », a-t-il ajouté.
Mais, selon le journal, si Trump a bien accueilli la proposition, il n'est pas clair si le président a examiné la nouvelle composante « Safe Home » de la proposition et la création d'une agence entière serait un énorme coup de pouce au Congrès.
« Mais le président a une réelle opportunité de laisser un héritage dans le domaine de la santé »
La proposition de HARPA, d'abord présentée comme un projet visant à améliorer le taux de mortalité du cancer du pancréas grâce à des recherches novatrices visant à mieux détecter et guérir les maladies, s'est souvent heurtée « obstacles institutionnels au progrès » au cours des deux dernières années, selon une autre personne familière avec les conversations. Mais M. Wright pense que le projet est fait sur mesure pour le président Trump.
M. Wright a déclaré : « Mais le président a une réelle opportunité de laisser un héritage dans le domaine de la santé ».
La proposition consiste à développer une « suite de capteurs » utilisant l'intelligence artificielle avancée pour essayer d'identifier les « signes neurocomportementaux » chez des personnes se dirigeant vers un acte explosif violent.
Selon une copie de la proposition, l'HARPA développerait des « technologies de pointe à haute spécificité et sensibilité pour le diagnostic précoce de la violence neuropsychiatrique ». « Une solution multimodale, avec une analyse de données en temps réel, est nécessaire pour obtenir un diagnostic aussi précis », lit-on sur le document. Selon le journal, le document énumère également un certain nombre de technologies largement utilisées qui pourraient être utilisées pour aider à recueillir des données, notamment Apple Watches, Fitbits, Amazon Echo et Google Home. Le document mentionne également les « outils puissants » collectés par les services de santé tels que l'IRMf, la tractographie et l'analyse d'images.
« Les outils analytiques avancés basés sur l'intelligence artificielle et l'apprentissage automatique s'améliorent rapidement et doivent être appliqués aux données », indique le document. Mais il n’y a pas lieu de vous s’inquiéter. Le projet ne devrait pas recueillir de données sensibles sur la santé des personnes sans leur permission. Le gouvernement se contentera d'identifier les facteurs de risque en matière de santé mentale qui pourraient indiquer un comportement violent, ont dit les personnes qui connaissent les discussions.
« La vie privée doit être protégée. Le profilage doit être évité. Les capacités de protection des données seront la pierre angulaire de cet effort », lit-on dans le projet. Par ailleurs, la recherche sera ouverte au public. Pourvu que les fusillades de masse ne soient pas utilisées comme prétexte pour avoir des données sur les gens au nom des services de santé mentale.
Sources : The Washington Post
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Le , par Stan Adkens
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