Le sénateur démocrate Bernie Sanders vient de devenir le premier candidat à la présidentielle US à demander l'interdiction de l'utilisation de logiciels de reconnaissance faciale par les forces de l'ordre. C’est l’un des axes de sa proposition de réforme en matière de justice criminelle. Le plan s’intitule Justice and Safety for All et a fait l’objet de publication il y a peu. Ce qu’il faut dire de façon brossée est que dans le cas où Sanders est élu, le maintien de l’ordre devrait pouvoir être effectué sans que les forces affectées à cette tâche ne puissent s’appuyer sur les dispositifs de reconnaissance faciale.
La parution du plan Justice and Safety for All précède la publication d’une lettre de 40 groupes de défenses des droits de l’Homme à l’intention de l’actuel gouvernement. « L'utilisation de la technologie de reconnaissance faciale par le gouvernement américain devrait être interdite en attendant un examen plus approfondi », lancent ses auteurs.
Les deux textes font suite à des décisions d’autorités locales de bannir l’utilisation de cette technologie par les forces de l’ordre. En effet, à mi-parcours de l’année précédente, San Francisco est devenu la première ville US à interdire l’usage de la reconnaissance faciale. Le texte y relatif définit le cadre d'une interdiction de l'utilisation de la reconnaissance faciale (que des entreprises du secteur de la Tech. comme Amazon et Microsoft vendent à diverses agences gouvernementales américaines) par les agences gouvernementales de la ville de San Francisco. En effet, Amazon livre ces systèmes à la police américaine ; il en est de même pour Microsoft qui le fait pour une prison sur le sol américain. Depuis lors, Oakland en Californie et Somerville dans le Massachusetts ont également interdit à la police d'utiliser ou d'acquérir un logiciel de reconnaissance faciale.
En fait, les derniers développements laissent penser qu’il souffle une espèce de vent de positionnement contre la technologie de reconnaissance faciale à l’échelle entière des USA. Seulement, pour rester dans le cadre des promesses de campagne, certains estiment que la reconnaissance faciale a sa place… C’est le cas d’un autre démocrate, Julian Castro, qui est d’avis que les caméras postées à l’angle des rues doivent faire partie de l’équation, mais en s’entourant de garde-fous définis dans des textes réglementaires.
À l’échelle mondiale, il faut dire que la technologie fait partie des plus mises en avant par les autorités de certains pays. C’est par exemple le cas de la Chine qui fait beaucoup parler d’elle en ce qui concerne son utilisation. Dans ce pays, la fiction Big Brother de 1984 est désormais une quasi-réalité avec des cas d’arrestations de fugitifs à l’aide de la reconnaissance faciale ou encore d’interdictions d’achats de billets de voyage dans le cadre d’un système de crédit social qui s’appuie sur ces systèmes de reconnaissance faciale.
Retour au cas étasunien pour préciser que ces outils sont beaucoup moins omniprésents, mais gagnent en popularité au sein des cercles des forces de l'ordre. Des douzaines de services de police locaux aux États-Unis utilisent la reconnaissance faciale pour établir des correspondances entre les photos de permis de conduire (et celles d'agressions) et les bases de données criminelles. Les particuliers s'en servent également pour surveiller les foules lors de manifestations ou dans les centres commerciaux afin d'identifier des suspects potentiels en temps réel. Toutefois, les défenseurs des libertés civiles tirent la sonnette d'alarme quant à ceci que l'usage de cette technologie peut avoir un effet dissuasif sur la liberté d'expression.
Dès la fin de l’année 2017, la Russie a entamé des tests d’un système de reconnaissance faciale alimenté par un système d’intelligence artificielle pour traiter les données récoltées à travers les 170 000 caméras de surveillance installées dans la ville de Moscou. Selon Artem Ermolaev, responsable du département des technologies de l’information à Moscou, la manœuvre aurait permis l’arrestation de six criminels qui étaient sur la liste fédérale des personnes recherchées. En France, les autorités ont déjà annoncé leur intention de tirer profit des avantages qu’offrent ces nouvelles technologies ; une technologie de reconnaissance faciale pour le contrôle automatisé des passeports est en principe en service depuis le mois de juillet 2018 au niveau des aéroports Roissy-Charles-de-Gaulle et Orly.
Lorsqu’on parle de reconnaissance faciale, deux factions s’opposent. Les partisans de cette technologie affirment qu'elle a la capacité d'aider les policiers à gagner en efficacité pour identifier et arrêter des suspects, mais les critiques pointent du doigt des exemples de mauvais usages qui, selon eux, prouvent qu'elle peut faire plus de mal que de bien. À ce propos, la plus grosse illustration est celle d’un test que l’Union américaine des libertés civiles (ACLU) a mené sur le système de reconnaissance faciale Amazon Rekognition. Il en est ressorti que le système identifiait à tort 28 membres de couleur de peau noire comme des criminels. Les retours de chercheurs du MIT avaient mis en lumière le fait que le logiciel donne de très mauvais résultats dans les cas d’identification des femmes et des personnes de couleur de peau noire. Dans chacun des cas, Amazon avait contesté les résultats. Des publications additionnelles ont aussi fait état de ce que les services de police se sont appuyés sur ladite technologie pour cibler les communautés noires et les activistes.
Sources : Sanders, Castro, lettre PLCOB
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Voir aussi :
Les caméras de reconnaissance faciale : outils de sécurité ou d'espionnage de masse ? La Chine et d'autres pays adoptent de plus en plus ces outils
Des responsables d'un aéroport déploient une technologie de reconnaissance faciale pour améliorer la sécurité et réduire les temps d'embarquement
UK : la technologie de reconnaissance faciale de la police aurait permis d'arrêter un suspect, grâce à l'amélioration du logiciel et de son algorithme
Bernie Sanders promet d'interdire l'utilisation de la reconnaissance faciale par le gouvernement US
Et ravive le débat global sur l'usage de cette technologie par les forces de l'ordre
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Le , par Patrick Ruiz
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