En 2017, le fondateur du site de rencontres amoureuses Tinder avait été questionné par un journaliste pour savoir à quoi ressemblerait son application d'ici 5 ans ? Sean Red, le patron de Tinder avait répondu en imitant une conversation imaginaire avec son smartphone. À la question « Tinder, comment se présente ma soirée ? », le dirigeant avait imaginé la réponse que donnerait l'intelligence artificielle à l'utilisateur : « Il y a, non loin d'ici, une personne qui vous attire et qui est attirée par vous. Elle est libre demain soir et vous aimez tous les deux ce groupe de rock qui va offrir un concert ce soir-là. On vous prend des billets ? »
Bien entendu, le scénario dessiné par Sean Rad, dans lequel les algorithmes seraient capables de résoudre l'équation de la rencontre amoureuse semblait encore relever de la science-fiction. Mais l'IA s'investit progressivement dans le champ de la rencontre amoureuse. Car plusieurs startups travaillent d'arrache-pied pour résoudre l'équation de la rencontre amoureuse en compilant un énorme volume de données (âge, sexe, géolocalisation, préférences sexuelles, mais aussi historique d'achats sur Internet ou playlists Spotify). Par exemple, la « coach » de l'application Meetic, Lara dispense déjà une cinquantaine de conseils : un bar à cocktail dans tel quartier ou une tenue à porter lors de la première rencontre.
D'autres startups ont décidé de se servir de l'intelligence artificielle différemment dans le domaine de la rencontre en ligne ; certaines ont décidé de vendre des images de visages générés par ordinateur qui ressemblent à la réalité, offrant aux entreprises la possibilité « d'augmenter la diversité » de leurs annonces sans avoir besoin d'êtres humains. C'est le cas par exemple d'Icons8, une firme de design basée en Argentine qui vend des illustrations numériques et des photos d'archives et qui a lancé son activité en ligne Generated.photos en décembre 2019, offrant « des modèles divers à la demande à l'aide de l'IA ».
Le site permet à quiconque de filtrer les fausses photos en fonction de l'âge (de « nourrisson » à « personnes âgées »), de l'origine ethnique (y compris « blanc », « latino », « asiatique » et « noir ») et de l'émotion (« joie », « neutre » , « surprise »), ainsi que le sexe, la couleur des yeux et la longueur des cheveux. Le système montre cependant un certain nombre de lacunes et de biais étranges : par exemple, la seule couleur de peau disponible pour les nourrissons est le blanc.
Dans ces cas d'utilisations, les experts en IA craignent que les contrefaçons ne conduisent à une nouvelle génération d'escrocs, de bots et d'espions, qui pourraient utiliser les photos pour créer des personnages en ligne imaginaires, masquer les biais d'embauche et nuire aux efforts visant à apporter de la diversité aux industries. Le fait qu'un tel logiciel ait désormais un modèle commercial pourrait également alimenter une plus grande érosion de la confiance sur un Internet déjà attaqué par des campagnes de désinformation, des vidéos deepfake et d'autres techniques trompeuses.
Une évolution des IA conversationnelles ?
Shane Mac, PDG et co-fondateur de la société d'IA conversationnelle Assist, a une approche différente dans cette industrie de la rencontre amoureuse : il voit l'acte de connexion initial, le swipe, comme déjà banal. Les premiers échanges en eux-mêmes le fatiguent, notamment les rondes nécessaires d'introduction, les plaisanteries soi-disant spirituelles et enfin l'invitation à se rencontrer. En théorie, cela devrait être la partie la plus « humaine » de l'application de rencontre ou de l'expérience du site, mais Mac décrit la réalité comme un exercice répétitif et engourdissant qui peut passer à l'assistance de la machine.
Une autre différence clé est que le « bot » de Mac n'est pas quelque chose que la plupart d'entre nous reconnaîtraient vraiment comme un bot en premier lieu. Il a créé un clavier virtuel pour les conversations liées aux rencontres. Au lieu de choisir des mots individuels, le clavier de Mac permet à l'utilisateur de sélectionner des niveaux de ce qu'il appelle des « intentions ». Il est difficile de trouver des photos du clavier en action, mais il montre une courte vidéo dans un fil Twitter. Dans une démonstration lors d'un échange sur Twitter avec Carolyne Penner, Shane Mac a montré ce que lui proposais son clavier : en premier plan il y avait ces « intentions » (présenter des excuses, plaisanter, s'engager, etc.) et une fois l'intention choisie il pouvait sélectionner un panel d'élément (curieux, emoji, typique, inviter à dîner, proposer une excursion). Le clavier se chargeait alors de faire des phrases en accord avec l'élément choisi.
Étant donné que le bot conversationnel de Mac est un clavier, et non une routine automatisée, il est difficile à détecter et il fonctionne sur n'importe quelle plateforme, de Tinder à Twitter. Bien que son utilisation pose des dilemmes éthiques évidents, il fait valoir que c'est déjà une réalité de la communication moderne, pas différent en principe des fonctionnalités Smart Compose ou Smart Reply de Gmail, qui vont au-delà de la correction orthographique et grammaticale pour offrir des tournures de phrase ou même des réponses entières en un un seul clic.
Mac a eu des résultats mitigés quand il a révélé qu'il s'est servie de ce « clavier intelligent » à des personnes qui avaient déjà accepté une rencontre (une femme qui travaillait dans la technologie pensait que c'était une bonne idée et voulait en savoir plus, mais une autre qui travaillait en fait pour une entreprise disposant d'une application de rencontres était assez furieuse pour annuler le rendez-vous). Lorsque Laurie Segall, ancienne journaliste technologique de CNN, a essayé le clavier elle-même, elle a eu un rendez-vous pouvant faire office de preuve de concept avec la première personne sur laquelle elle l'a essayé, mais quand elle lui a révélé qu'elle s'est servi de ce clavier intelligent, il s'est mis en colère et a annulé.
La réalité actuelle du clavier de Mac semble plus proche d'une version texte d'une carte son à thème qu'elle ne l'est des outils d'écriture d'intelligence artificielle récents comme GPT-2. Mais Mac a des idées beaucoup plus élevées sur l'avenir de l'IA dans l'industrie des rencontres, et il postule un avenir dans lequel les assistants numériques sont invités à parcourir les médias sociaux à la recherche de personnes dont l'écriture et la conversation semblent compatibles avec celles de leurs utilisateurs.
Le clavier de Mac, qui n'est pas accessible au public en partie en raison de ses propres préoccupations concernant l'utilisation éthique, n'est pas la seule IA à se frayer un chemin dans des conversations intimes au-delà des frontières des plateformes. Une application de messagerie SMS Android appelée Mei offre une fonctionnalité d'IA en option qui analyse vos conversations et offre des conseils sur la façon dont l'autre personne se sent et sur la meilleure façon de les aborder pour poursuivre votre conversation.
Source : clavier en action, Assist, Mei
Et vous ?
Considérez-vous ces bots comme de véritables IA ou simplement des algorithmes ?
Peut-on dire que les sites qui utilisent ces bots sont des arnaques ?
Avez-vous été déjà victime de ce genre de supercherie ?
Avez-vous déjà développé ce genre de bot ?
Que pensez-vous de la vision du patron de Tinder qui imagine ce type de réponse que donnerait une IA à un utilisateur : « Il y a, non loin d'ici, une personne qui vous attire et qui est attirée par vous. Elle est libre demain soir et vous aimez tous les deux ce groupe de rock qui va offrir un concert ce soir là. On vous prend des billets ? »
Que pensez-vous de la vision de Shane Mac qui imagine un avenir dans lequel les assistants numériques sont invités à parcourir les médias sociaux à la recherche de personnes dont l'écriture et la conversation semblent compatibles avec celles de leurs utilisateurs ?
Assiste-t-on à l'évolution des IA conversationnelles dans l'industrie des rencontres en ligne ?
Fatigué d'écrire les banalités d'usage, un ingénieur s'appuie sur une IA et obtient des rendez-vous
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Le , par Stéphane le calme
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