Amazon et Anthropic ont annoncé la semaine dernière un partenariat dans le cadre duquel le premier pourrait investir jusqu'à 4 milliards de dollars dans le second. Selon les termes de l'accord, Amazon investira dans un premier temps 1,25 milliard de dollars dans Anthropic en échange d'une participation minoritaire dans la startup d'IA. Cela permet au géant américain du commerce électronique de se lancer dans la course à l'IA. Le contrat stipule que le montant pourrait ensuite être porté à 4 milliards de dollars en fonction de certaines conditions. Anthropic aura alors accès à la plateforme de cloud computing d'Amazon pour l'aider à optimiser ses systèmes d'IA.
En avril, il a été révélé qu'Anthropic vise à lever jusqu'à 5 milliards de dollars au cours des deux prochaines années pour s'attaquer à son rival OpenAI et pénétrer dans plus d'une douzaine d'industries majeures. Un pitch deck pour le tour de financement de série C d'Anthropic révèle ces objectifs et d'autres objectifs à long terme pour la société, qui a été fondée en 2021 par d'anciens chercheurs d'OpenAI. Selon le document, Anthropic prévoit de construire un "modèle frontière" qui sera 10 fois plus performant que l'IA la plus puissante d'aujourd'hui. Mais elle affirme que cela nécessitera des dépenses d'un milliard de dollars au cours des 18 prochains mois.
Anthropic décrit le modèle frontière comme un algorithme de nouvelle génération pour l'autoapprentissage de l'IA, faisant référence à une technique d'apprentissage de l'IA qu'elle a développée et qui s'appelle "l'IA constitutionnelle". À un niveau élevé, l'IA constitutionnelle cherche à fournir un moyen d'aligner l'IA sur les intentions humaines, en permettant aux systèmes de répondre aux questions et d'effectuer des tâches en utilisant un simple ensemble de principes directeurs. Anthropic estime que son futur modèle frontière nécessitera environ 1025 FLOP, soit plusieurs ordres de grandeur de plus que les plus grands modèles (LLM) actuels.
Selon le document, ce modèle frontière, provisoirement appelé "Claude-Next", pourrait être utilisé pour créer des assistants virtuels capables de répondre aux courriels, d'effectuer des recherches et de générer des œuvres d'art, des livres et bien d'autres choses encore. À long terme, Anthropic vise à confier la gestion de certains pans de l'économie à son modèle d'IA. « Ces modèles pourraient commencer à automatiser de larges pans de l'économie. Nous pensons que les entreprises qui forment les meilleurs modèles 2025/26 seront trop en avance pour que quiconque puisse les rattraper dans les cycles suivants », peut-on lire dans le dossier de présentation.
Les ressources informatiques d'AWS seront sans doute d'un grand aide à cet égard. Anthropic ne se contente pas d'augmenter la puissance de l'IA actuelle, elle affirme également vouloir rendre son IA autodidacte afin de résoudre certains des problèmes liés aux erreurs et aux hallucinations de l'IA actuelle. Elle explique que grâce à l'IA constitutionnelle, son chatbot Claude est beaucoup moins susceptible de produire des résultats nuisibles et est plus facile à diriger. Anthropic a commercialisé son chatbot Claude en mars dernier, après une version bêta fermée à la fin de l'année dernière, permettant à une quinzaine de partenaires de bénéficier d'un accès initial.
Mais l'idée consistant à confier la gestion de "larges pans de l'économie mondiale" à l'IA n'emballe pas grand monde. Bien qu'Anthropic n'ait pas donné une explication claire sur ce projet, ce dernier fait l'objet de nombreuses critiques. La startup est notamment accusée de vouloir creuser davantage les inégalités sociales en arrachant des centaines de millions d'emplois aux travailleurs humains pour ensuite les confier aux machines pilotées par l'IA. « C'est un projet dystopique et Anthropic n'a pas réfléchi aux implications négatives. En outre, je n'ai jamais vu des gens riches et puissants aussi désireux de mettre des centaines de millions de personnes à la rue », a écrit un critique.
Les plans d'Anthropic ont été initialement rapportés par Techcrunch. Dans son pitch deck, Anthropic aurait déclaré : « nous pensons que les entreprises qui forment les meilleurs modèles 2025/26 seront trop en avance pour que quiconque puisse les rattraper dans les cycles suivants ». Cela laisse penser que les efforts d'Anthropic ne sont peut-être pas motivés par l'amélioration du bien-être commun, mais par la recherche d'une place de leader dans la course à l'IA et les domaines connexes. Cette déclaration fait l'objet de controverses et les critiques affirment que les plans d'Anthropic ont tout pour plaire à Amazon, poursuivie pour détention de monopole.
« L'IA a le potentiel d'aider l'humanité à résoudre un grand nombre de problèmes et améliorer nos conditions de vie, mais les riches et les multinationales vont tenter de l'accaparer pour continuer à s'enrichir et maintenir les inégalités sociales en place. C'est ainsi qu'ils se sentent vivants. C'est complètement insensé. Et malgré toutes les préoccupations suscitées par Amazon et sa monopolisation de la vente au détail en ligne, je suis surpris que les médias mainstream ne se soient pas aperçus que le géant de Seattle investissait massivement dans une entreprise dont l'objectif déclaré est d'automatiser des pans entiers de l'économie mondiale », a écrit un critique.
« Il s'agit vraiment d'une entreprise "à vos risques et périls". Ils partent du principe que les gens vont rester pacifiques alors qu'ils seront mis au chômage et privés de ressource et de besoins de base. Allez-y, faites de la vie quotidienne une crise existentielle pour des milliards de personnes. Donc si Anthropic vise à créer un chômage de masse, voici ma question : si personne n'a un emploi bien rémunéré ou juste un peu rémunéré, qui achètera quoi que ce soit ? », note un critique. D'autres préfèrent tourner en dérision le nom de l'entreprise : « le nom de l'entreprise - Anthropic - est plutôt ironique puisque son objectif principal est le chômage de masse ».
En outre, le dossier de présentation révèle également qu'Alameda Research Ventures, la société sœur de FTX, la bourse de cryptomonnaie de Sam Bankman-Fried qui s'est effondrée, était un "investisseur silencieux" dans Anthropic avec des actions "sans droit de vote". Alameda serait responsable du lancement de la série B de 580 millions de dollars d'Anthropic. La startup d'IA s'attend à ce que les actions d'Alameda soient cédées dans le cadre d'une procédure de faillite au cours des prochaines années. Bankman-Fried est poursuivie en justice dans le cadre de la faillite de FTX et Anthropic fait l'objet de nombreux soupçons en raison de ses liens avec Alameda.
En investissant 4 milliards de dollars dans Anthropic, Amazon fait son entrée dans la grande course à l'IA et devrait s'appuyer sur la technologie d'Anthropic pour améliorer ses produits. Dans un communiqué annonçant le partenariat avec Anthropic, Andy Jassy, PDG d'Amazon, a déclaré : « nous avons un immense respect pour l'équipe et les modèles de fondation d'Anthropic, et nous sommes convaincus que nous pouvons contribuer à améliorer l'expérience de nombreux clients, à court et à long terme, grâce à notre collaboration approfondie ». Les clients d'AWS devraient également bénéficier d'un accès anticipé à certaines fonctionnalités lancées par Anthropic.
La collaboration entre Amazon et Anthropic a le potentiel de révolutionner le paysage du commerce électronique. Avec l'essor des chatbots d'IA, les entreprises peuvent s'attendre à des interactions élevées avec les clients, à des recommandations plus utiles et à des processus transparents. Amazon pourrait également s'appuyer sur la technologie d'Anthropic pour redonner vie et monétiser son assistant virtuel Alexa, qui est dans une phase difficile. L'entreprise prévoit d'intégrer à Alexa de nouvelles fonctionnalités basées sur l'IA dans un avenir proche. Selon Amazon, une fois que ces fonctions arriveront à maturité, les utilisateurs devront payer pour y accéder.
Par ailleurs, Amazon n'est pas le seul géant technologique ayant investi dans Anthropic. Au début de l'année, Google a également annoncé un investissement de 300 millions de dollars dans Anthropic, ce qui lui donnerait une participation de 10 % dans la startup d'IA. Selon les termes de l'accord, Anthropic a accepté de faire de Google Cloud Platform son "fournisseur privilégié" en matière de cloud computing. Cependant, ces mêmes termes semblent se retrouver dans le nouveau partenariat entre Anthropic et Amazon. L'on ignore comment Anthropic compte s'y prendre, mais l'entreprise a prévu de faire d'autres annonces dans les prochaines semaines.
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Quels impacts ce projet pourrait-il avoir sur l'économie mondiale et sur les travailleurs humains ?
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Quels sont les risques de ce projet ? L'IA est-elle prête à prendre en charge de grands pans de l'économie ?
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