Les entreprises d'IA proposent des rémunérations élevées aux chercheurs en IA
La course à l'IA bat son plein et la demande mondiale pour les compétences en IA (apprentissage automatique, apprentissage profond, science des données, traitement du langage naturel…) est à la hausse. Selon de nombreuses études, la demande dépasse largement l'offre réelle et que cela concerne à la fois les ingénieurs en IA et les chercheurs en IA. Une enquête publiée par le Computing Research Association (CRA) en 2021 indique seuls 1 691 doctorats ont été délivrés dans le domaine de la recherche informatique. Le problème a été accentué avec l'arrivée des grands modèles de langage (LLM). Rien qu'aux États-Unis, l'industrie aurait besoin de plus de 335 000 chercheurs en informatique et la demande augmenterait de 21 % par an.
Cela signifie que chaque année, il y a environ 5 000 emplois de chercheurs scientifiques de plus qu'il n'y a de chercheurs scientifiques pour les occuper. Sachant cela, les entreprises semblent prêtes à faire des offres très alléchantes pour attirer les chercheurs en IA. Un rapport publié au début de l'année par Rora inc., une entreprise qui fournit aux professionnels des pistes pour bien négocier leurs rémunérations, indique que les chercheurs en IA ont désormais l'opportunité de négocier des rémunérations à des sommets jamais atteints auparavant. Le rapport comprend un tableau qui est censé lister les différents niveaux de rémunération auxquels les chercheurs en IA peuvent prétendre selon l'entreprise ou le laboratoire d'IA qui tente de les enrôler.
L'on peut remarquer, par exemple, qu'un chercheur en IA peut prétendre à une rémunération allant jusqu'à 865 000 dollars par an en travaillant pour OpenAI. Anthropic et InflectionAI, deux startups concurrentes d'OpenAI, proposent également des rémunérations se trouvant dans la même fourchette. Ainsi, un ingénieur en IA d'Anthropic pourrait gagner jusqu'à 855 000 $ par an ; un chercheur en IA pourrait convaincre InflectionAI de le rémunérer à hauteur de 825 000 $ par an. Parmi les autres entreprises listées, on distingue Tesla qui serait capable de rémunérer un chercheur en IA à hauteur de 780 000 $ par an, Amazon avec 719 000 $, Google Brain avec 695 000 $, FAIR (Facebook Artificial Intelligence Research) avec 556 000 $, et bien d'autres.
En regardant le tableau de plus près, l'on peut remarquer que les startups d'IA (OpenAI, InflectionAI et Anthropic) semblent prêtes à payer beaucoup plus que les entreprises bien établies. Il convient toutefois de noter que Microsoft est le principal investisseur d'OpenAI et qu'Amazon a investi cette année plusieurs milliards de dollars dans Anthropic. Le partenariat entre OpenAI et Microsoft permet à la firme de Redmond d'avoir un accès exclusif aux technologies développées par la startup d'IA et de les intégrer à ses outils de productivité et à d'autres logiciels. Amazon n'a pas laissé transparaitre des détails sur ses intentions avec Anthropic, mais les analystes s'attendent à ce que leur partenariat ressemble à celui qui existe entre OpenAI et Microsoft.
Les auteurs du rapport affirment qu'il s'adresse aux doctorants de 4e et 5e année ou aux postdoctorants de dernière année qui souhaitent passer du monde universitaire à l'industrie et qui ont une formation en apprentissage automatique. Mais des critiques affirment que ces rémunérations ciblent davantage les chercheurs en IA chevronnés qui constituent un groupe très restreint. « C'est très bien et cela attire l'attention. Mais il faut savoir qu'il n'y a pas trop de monde dans ce groupe. Peut-être quelques milliers de personnes ? Ils sont tous titulaires d'un doctorat obtenu dans le cadre d'un programme d'études supérieures, ont publié des articles très importants, ont apporté des contributions majeures à des projets open source, etc. », note un critique.
Quels sont les domaines de recherche les plus prisés par les entreprises d'IA ?
À l'heure actuelle, la demande la plus forte concernerait l'application de l'apprentissage automatique à la vision par ordinateur (autonome et visuelle), à la robotique, au traitement du langage naturel (NLP), à la biologie et aux neurosciences. Avec l'introduction de ChatGPT, une formation sur les grands modèles de langage est devenue un nouvel ensemble de compétence en vogue. Des entreprises comme Amazon, Google, et Meta (la société mère de Facebook) lancent des équipes liées à l'IA générative pour la génération de langage, d'images et de vidéos. Alors, qu'est-ce que les entreprises prennent en compte lorsqu'elles évaluent les candidats. Pour un chercheur en IA, des compétences avérées en matière de recherche sont primordiales.
L'un des aspects à prendre en compte est le nombre de publications. Les meilleurs chercheurs peuvent avoir jusqu'à 2 000 citations rien qu'avec leur doctorat et un indice H de 10. Pourtant, le rapport estime qu'il n'est pas nécessaire d'avoir un tel palmarès de publications pour négocier avec succès. Chaque chercheur dispose d'un levier de négociation, mais les meilleurs chercheurs pourraient négocier des postes plus importants et les rémunérations les plus élevées susmentionnées. De plus, les entreprises s'intéressent aux articles publiés par les chercheurs et qui ont été sélectionnés par les meilleures conférences sur l'IA telles que NeurIPS, ICML, ICCV, etc. Elles se penchent également sur l'expérience professionnelle en dehors du monde universitaire.
Les stages indiquent que les chercheurs sont capables de s'adapter à l'environnement industriel et qu'ils ne sont pas un universitaire dans sa tour d'ivoire. Enfin, faire de la recherche pour les professeurs qui dirigent des laboratoires universitaires et sont également directeurs de recherche dans l'industrie permet aux chercheurs de nouer des relations dans l'industrie pendant qu'ils sont à l'université. L'informatique est un domaine universitaire unique qui recoupe largement l'industrie privée. Il n'est pas rare que des professeurs soient également directeurs de recherche, comme le Français Yann Lecun. Lauréat du Turing 2018, il dirige un laboratoire à l'université de New York et est le responsable scientifique de l'IA chez FAIR, le laboratoire d'IA de Meta.
Les rémunérations des chercheurs en IA, comme dans le cas des rémunérations figurant dans le tableau ci-dessus, comprennent le salaire de base, les primes et les actions. Le rapport estime que les primes à la signature ou autres primes en espèces peuvent aller de 0 à 700 000 $ sur une période de quatre ans, mais elles ne sont pas incluses dans le tableau ci-dessus. D'après les offres mentionnées dans le tableau, il est clair que des entreprises comme Anthropic, Tesla, OpenAI, Google Brain et Amazon ont fait les offres initiales les plus élevées (et étaient prêtes à négocier un accord final plus élevé), mais les entreprises qui ont le plus augmenté leurs offres sont Google Research, Microsoft Research, Bloomberg AI, IBM Research et TikTok.
Les startups comme Anthropic, Inflection et Altos Labs continuent de lever des centaines de millions de dollars pour recruter des talents. Bien que le recrutement ait ralenti dans les laboratoires traditionnels de Google, Meta, etc. par rapport à il y a cinq ans, ces organisations continuent de se développer. Les startups financées par du capital-risque et axées sur l'IA ont accéléré leur recrutement depuis l'avènement du ChatGPT. Nous nous attendons à ce que ces embauches se poursuivent, car les sociétés de capital-risque ont beaucoup de capital à déployer ; elles sont susceptibles d'investir massivement en dépit des conditions économiques. Cependant, les chercheurs en IA ne sont pas les seuls concernés par les rémunérations élevées.
Les ingénieurs en IA peuvent aussi prétendre à des rémunérations généreuses
Le terme "ingénieur en IA" pourrait faire référence à une personne qui développe des applications et des produits d'IA à partir de ce que les chercheurs en IA produisent. Ce terme est encore nébuleux et il n'est pas encore certain qu'il s'agisse d'un métier à part entière à ce stade. Toutefois, avec l'intensification de la course à l'IA, le terme est de plus en plus utilisé et l'on peut voir de nombreux de rapports qui étudient l'écosystème de ces travailleurs et leurs rémunérations. Des statistiques publiées au début de l'année par le Bureau américain des statistiques du travail (US Bureau of Labor Statistics) ont révélé que les travailleurs portant le titre d'ingénieurs en IA peuvent s'attendre à un salaire annuel moyen pouvant aller jusqu'à 136 620 dollars.
Glassdoor rapporte que le salaire de base moyen d'un ingénieur en IA est de 108 043 $ par an aux États-Unis. En France, le salaire moyen annuel d'un ingénieur en IA serait de 50 ;139 euros par an. Selon les analystes, ces chiffres sont nettement supérieurs au salaire annuel moyen de l'ensemble des professions dans ces pays. Les ingénieurs en IA collaborent généralement avec des scientifiques des données et d'autres parties prenantes, traduisant leurs stratégies axées sur les données en une application d'IA au niveau de la production. Voici d'autres exemples :
- Allemagne : le salaire annuel d'un ingénieur en IA serait d'environ 84 574 euros ;
- Royaume-Uni : un ingénieur en IA pourrait toucher un salaire moyen annuel pouvant aller jusqu'à 60 000 livres par an ;
- Australie : le salaire d'un ingénieur en IA pourrait atteindre 110 000 dollars australiens par an ;
- Singapour : le salaire annuel moyen d'un ingénieur en IA serait de 74 943 dollars singapouriens ;
- Canada : le salaire annuel moyen d'un ingénieur en IA s'élèverait à plus de 85 000 dollars canadiens.
En dehors du monde de la technologie, des secteurs comme la finance, la santé et la science sont également à la recherche de chercheurs et d'ingénieurs en IA pour appliquer cette nouvelle technologie à leur domaine. Les salaires généreux sont une indication forte de la demande croissante d'ingénieurs en IA et de la valeur que les entreprises accordent à ces fonctions. En plus, le salaire d'un ingénieur en IA ne se limite pas au salaire de base. La rémunération complète peut inclure d'autres éléments comme :
Salaire de base
Le salaire moyen se situe entre 100 000 et 115 000 dollars, tandis que la fourchette globale des salaires s'étend de 67 000 dollars pour les postes de débutants à plus de 160 000 dollars pour les postes d'ingénieurs en IA principaux. Sur une base horaire, les ingénieurs en IA gagnent en moyenne 55 dollars par heure. Les freelances travaillant sur des projets à court terme peuvent facturer un montant plus élevé pour couvrir leurs frais de travail indépendant.
Primes et avantages
Au-delà d'un salaire de base généreux, les ingénieurs en IA bénéficient souvent d'un régime de rémunération comprenant de nombreux primes et avantages. La réalisation d'excellentes performances au sein de l'entreprise, l'atteinte d'objectifs individuels ou le franchissement d'étapes clés ne sont que quelques-unes des façons d'obtenir des primes significatives dans ce poste. En matière d'avantages, ceux qui travaillent dans des startups ou pour des acteurs majeurs du secteur comme Google ou Amazon voudront probablement investir dans des actions de l'entreprise ou d'autres options d'achat d'actions.
Cet investissement peut augmenter considérablement leurs revenus annuels, surtout si l'entreprise connaît un succès important. Et le fait de devenir ingénieur en IA ne se traduit pas uniquement par des avantages monétaires. De nombreux employeurs offrent des prestations de soins de santé étendues et d'autres avantages appréciés, tels que des congés payés, des horaires de travail à distance, des crédits de formation continue, etc.
Perspectives d'emploi et croissance de l'ingénieur en IA
Quant aux perspectives d'emploi, le Bureau américain des statistiques du travail s'attend à ce que les carrières dans le domaine de l'IA connaissent une croissance de 21 % entre 2021 et 2031. On s'attend aussi à ce que les ingénieurs en IA aient des options de carrière polyvalentes dans différents secteurs et ne soient pas confinés à un seul secteur, leur expertise étant recherchée dans divers domaines. Le secteur technologique reste l'employeur principal, car les entreprises continuent d'innover et d'intégrer des solutions d'IA dans leurs produits et services. La finance est un autre secteur où les ingénieurs en IA devraient être très demandés.
L'IA est largement utilisé dans ce domaine pour l'analyse prédictive, l'évaluation des risques, la détection des fraudes et la gestion de portefeuille. Le secteur de la santé est également appelé à développer ses capacités technologiques pour mettre au point des systèmes d'IA pour le diagnostic, les recommandations de traitement et même la médecine personnalisée. Enfin, le secteur du conseil est de plus en plus à la recherche d'ingénieurs en IA. Ce large éventail d'industries employant des ingénieurs en IA témoigne de la polyvalence et de la forte demande de cette profession.
Sources : Glassdoor (1, 2), US Bureau of Labor Statistics, PricewaterhouseCoopers (PDF)
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Selon vous, pourquoi les entreprises technologiques sont-elles prêtes à dépenser autant pour recruter des talents en IA ?
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