Google, Samsung, Intel, ARM et Fujitsu, réunis au sein de la Fondation UXL, s'attaquent frontalement à la domination de Nvidia sur le marché lucratif des puces pour l'IA. L'objectif affiché de la Fondation UXL est d'éliminer les barrières logicielles propriétaires qui ont permis à Nvidia de dominer le marché de l'IA. Notamment, l'initiative s'attaque à la plateforme CUDA de Nvidia, utilisée par plus de 4 millions de développeurs dans le monde, en proposant une alternative open source. CUDA est disponible depuis une quinzaine d'années, mais est conçue pour fonctionner avec le matériel GPU de l'entreprise. Ce qui a fait de Nvidia l'un des grands gagnants de la course à l'IA.
Nvidia est devenu le premier fabricant de puces à atteindre une capitalisation boursière de 2 000 milliards de dollars le mois dernier, après avoir connu une croissance rapide en se concentrant sur le matériel destiné à piloter les modèles d'IA, comme ses GPU A100 et H100. En matière de performance, les puces de l'entreprise, qui obligent les développeurs à utiliser la plateforme CUDA de Nvidia, sont supérieures à tout ce qui est actuellement produit par d'autres fabricants de puces. Ces puces sont hautement convoitées dans l'industrie de l'IA et les plus gros clients de Nvidia sont les entreprises comme Microsoft, Meta et Google.
La demande explosive a entraîné une pénurie alors que les entreprises rivales continuent de développer leurs propres alternatives. Par ailleurs, CUDA étant un système qui ne cible que les GPU Nvidia, il arrive que les développeurs qui connaissent le développement CUDA soient contraints de choisir les GPU Nvidia. Lors de l'événement Computex 2023, le PDG de Nvidia, Jensen Huang, a déclaré que quatre millions de développeurs utilisaient le modèle informatique CUDA. De nombreux critiques accusent Nvidia de limiter le choix des développeurs, ce qui lui permet de garder une avance sur ses rivaux et d'en tirer plein de profits.
Afin de briser la domination de Nvidia dans le domaine de l'IA, un groupe industriel comprenant Intel, Google, Fujitsu, ARM, etc. est en train de construire un environnement de développement de l'IA pour concurrencer CUDA. Réunis au sein d'un groupe Unified Acceleration Foundation (Fondation UXL), ces entreprises développent une suite logicielle open source dont l'objectif est d'éviter que les développeurs d'IA soient enfermés dans la technologie propriétaire de Nvidia. Cette alternative open source permettra au code d'un développeur de fonctionner sur n'importe quelle machine et avec n'importe quelle puce.
La Fondation UXL a déclaré à Reuters que les détails techniques du projet devraient atteindre un état "mature" d'ici le second semestre de cette année, bien qu'aucune date de publication finale n'ait été communiquée. Le projet comprend actuellement la norme ouverte OneAPI qu'Intel a développée pour éliminer les exigences telles que les langages de codage spécifiques, les bases de code et autres outils qui lient les développeurs à l'utilisation d'une architecture spécifique, comme CUDA. Le groupe affirme que le projet visera dans un premier temps à ouvrir des options pour les applications d'IA et de calcul à haute performance.
Mais le projet prévoit également de prendre en charge le matériel et le code de Nvidia. La Fondation UXL cherche à obtenir l'aide d'autres fabricants de puces et de sociétés de cloud computing comme Microsoft et Amazon afin de s'assurer que la solution peut être déployée sur n'importe quelle puce ou n'importe quel matériel. Microsoft, qui ne fait notamment pas partie de la coalition UXL, aurait fait équipe avec AMD l'année dernière pour développer des puces d'IA alternatives qui pourraient remettre en cause le monopole effectif de Nvidia sur le secteur. D'autres fabricants de puces travaillent également sur des alternatives.
Rod Burns, président du comité directeur de la fondation UXL, affirme : « en fait, la spécification est en cours de développement depuis quelques années et a été publiée régulièrement au cours de cette période. Cela signifie que nous disposons déjà d'une spécification mature pour la plupart des éléments fondamentaux nécessaires. Ce travail se poursuit jusqu'en 2024 par l'intermédiaire de l'affinage et est dirigé par le groupe de travail sur les spécifications au sein de la fondation, nous viserons à ratifier une version de la spécification au quatrième trimestre ». Il a ajouté que le travail sur les implémentations est aussi en cours :
« Par ailleurs, des implémentations de la spécification sont en cours de développement depuis quelques années et sont désormais utilisées par certains développeurs pour écrire du code et cibler plusieurs fournisseurs. Notre objectif pour cette année est de continuer à développer le support des fournisseurs pour les bibliothèques, d'ajouter de nouvelles fonctionnalités et de suivre les meilleures pratiques de gouvernance ouverte afin de fournir une spécification adaptée à l'ensemble de la communauté ». En outre, en dehors des entreprises susmentionnées, le projet bénéficie également du soutien de Qualcomm et de VMware.
Le support hétérogène recherché par l'organisation est destiné à inclure non seulement les CPU et les GPU, mais aussi d'autres accélérateurs, y compris les FPGA, bien que l'intérêt récent pour l'accélération de l'IA se soit largement concentré sur les GPU. « La demande croissante de charges de travail à forte intensité de données a entraîné une prolifération de l'utilisation des GPU et, plus récemment, l'émergence d'applications d'IA basées sur grands modèles de langage [Large language model - LLM] a créé une explosion de l'utilisation des GPU », a écrit Burns au moment de l'annonce de la Fondation UXL en septembre.
« Le défi auquel nous sommes à l'heure actuelle confrontés est que, alors que Linux et GNU ont transformé la pile logicielle des processeurs en utilisant des projets open source et basés sur des normes, la pile logicielle des GPU est encore assez nouvelle et les normes sont, dans certains domaines, en particulier l'IA, encore en cours de définition », a-t-il ajouté. Burns est aussi le vice-président de l'écosystème chez Codeplay Software. Codeplay a été racheté par Intel en 2022 pour ses compétences en matière de SYCL, une couche d'abstraction multiplateforme utilisée par la pile logicielle OneAPI du fabricant de puces.
Bien entendu, il ne sera pas facile de contester la domination de Nvidia. En effet, bien que la Fondation UXL vise à terme à prendre en charge le matériel et le code de Nvidia, de nombreux clients ont déjà investi de grosses sommes d'argent dans des projets basés sur la pile logicielle de Nvidia et pourraient ne pas voir de raison de changer.
Source : la Fondation UXL
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Le , par Mathis Lucas
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