
Les projections concernant l'impact de l'IA sur le marché de l'emploi sont diverses.
Certains, comme l'économiste du MIT, David Autor, conteste l'idée largement répandue selon laquelle l'intelligence artificielle (IA) serait nécessairement destructive d'emplois. Autor soutient que l'IA pourrait contribuer à la reconstruction de la classe moyenne en élargissant l'accès à des expertises spécialisées. Il met en lumière le fait que la crainte de la diminution des emplois en raison de l'IA est déplacée, car le monde industrialisé est confronté à une pénurie de main-d'œuvre due à des facteurs démographiques.
Une thèse que Google embrasse volontiers. L'entreprise a publié une étude qui suggère que les capacités actuelles de l'IA sont exagérées et qu'elle est encore loin de pouvoir remplacer une bonne partie de la main-d'œuvre mondiale comme certains veulent le faire croire. Mais encore, le rapport insiste sur le fait que cela ne devrait pas changer à court terme en raison des limites de la technologie. Il indique que l'IA n'est pas encore en mesure d'effectuer de manière fiable un travail en plusieurs étapes qui impliquent de la planification, du raisonnement ou de la mémoire. Le rapport est avant tout un retour à la réalité dans un contexte de battage médiatique incessant sur l'IA générative et ses capacités réelles.
D'autres y voient une menace. C'est le cas de The Burning Glass Institute qui a fait une liste le développement de logiciels parmi les métiers concernés. La publication des résultats de cette enquête fait suite à une autre de l’OIT qui liste la même catégorie de professionnels parmi ceux sous la menace de l’intelligence artificielle. Le tableau ravive les questionnements sur les perspectives de mise au rebut totale des développeurs humains.
« Comme le montre la figure 4, les précédentes vagues d'automatisation ont surtout touché les professions à bas salaires (indiquées par des barres bleues). La vague d'automatisation par l’IA générative est unique en ce sens que les cols bleus pourraient être les moins touchés. Cela s'explique à la fois par l'augmentation de la demande de ces travailleurs en raison de la croissance des catégories de biens et de services haut de gamme et l'incapacité de l’intelligence artificielle générative à effectuer des tâches physiques. En fait, les professions les plus exposées à l'intelligence artificielle générative sont les professions libérales à haut salaire (illustrées par des barres jaunes) », soulignent les résultats de l’enquête.
C'est dans cette dernière catégorie que figure Avital Balwit.
« La réaction générale des travailleurs du savoir aux modèles de langage est celle du déni »
Avital Balwit s'est exprimée dans un billet de blog :
« J’ai 25 ans. Ces trois prochaines années pourraient bien être les dernières années où je travaille. Je ne suis pas malade, je ne deviens pas mère au foyer, et je n’ai pas eu la chance financière d’être au bord de la retraite volontaire. Je me tiens au seuil d’un développement technologique qui semble probablement mettre fin à l’emploi tel que je le connais.
« Je travaille dans une entreprise d’intelligence artificielle de pointe. À chaque itération de notre modèle, je suis confrontée à quelque chose de plus capable et de plus général que précédemment. À ce stade, il peut générer de manière compétente un contenu cohérent sur une large gamme de sujets. Il peut résumer et analyser des textes de manière passable. En tant que personne qui a autrefois gagné de l’argent en tant que rédactrice indépendante et qui était fière de sa capacité à écrire de grandes quantités de contenu rapidement (une compétence qui, comme découper des blocs de glace d’un étang gelé, est sans doute obsolète), il m’est difficile de ne pas remarquer ces avancées.
« L’écriture indépendante a toujours été une compétence très demandée, et l’introduction des modèles de langage a encore intensifié la concurrence. La réaction générale des travailleurs du savoir aux modèles de langage est celle du déni. Ils s’accrochent aux rares domaines où de tels modèles ont encore du mal, plutôt que de remarquer l’étendue croissante des tâches où ils ont atteint ou dépassé le niveau humain ».
« Beaucoup souligneront que les systèmes d’IA n’écrivent pas encore de livres primés, sans parler de breveter des inventions. Mais la plupart d’entre nous non plus ne faisons pas ces choses. La comparaison économiquement et politiquement pertinente pour la plupart des tâches n’est pas de savoir si le modèle de langage est meilleur que le meilleur humain, mais s’il est meilleur que l’humain qui ferait autrement cette tâche.
« Cela rend l’objection selon laquelle les systèmes d’IA ne codent pas encore de longues séquences ou ne font pas plus que des mathématiques assez basiques par rapport à la réalité. Mais ces systèmes continueront de s’améliorer dans toutes les tâches cognitives. L’objectif commun du domaine de l’intelligence artificielle est de créer un système capable de tout faire. Je m’attends à ce que nous y parvenions bientôt.
« Si j’ai raison, comment devrions-nous envisager l’obsolescence imminente du travail ? Il convient de noter d’emblée que même aujourd’hui, le travail est loin d’être le seul moyen de participer à la société. Néanmoins, il s’est avéré être le meilleur moyen de transférer richesse et ressources ; il offre des biens personnels tels que la connexion sociale, le statut et le sens ; et il offre des biens sociaux tels que la stabilité politique.
« Face à cette possibilité de perte, devrions-nous réagir avec tristesse, peur, joie ou espoir ? Les effets économiques globaux de l’intelligence artificielle générale (IAG) sont difficiles à prévoir, et je me concentrerai ici sur la question de savoir comment les gens se sentiront sans travail, s’ils pourront être heureux. Il existe évidemment d’autres questions vitales, comme celle de savoir comment les gens pourront satisfaire leurs besoins matériels. Beaucoup ont examiné cette question, sans qu’une réponse définitive ait encore été adoptée comme politique officielle par un gouvernement. Je vais plutôt faire quelque chose qui peut sembler être de la triche ».
Pour elle, l'obsolescence du travail tel que nous le connaissons est en marche
« Je m'attends à ce que l'IA devienne beaucoup plus performante qu'elle ne l'est aujourd'hui. La recherche sur les systèmes d'IA a montré qu'ils s'améliorent de manière prévisible avec de meilleurs algorithmes, des données plus nombreuses et de meilleure qualité, et une plus grande puissance de calcul. Les laboratoires sont en train d'augmenter la taille de leurs clusters, c'est-à-dire les groupes d'ordinateurs sur lesquels tournent les algorithmes. L'apprentissage automatique est un domaine jeune, avec une énorme quantité de « fruits à portée de main » en termes de découvertes, ce qui signifie que les chercheurs trouvent continuellement des améliorations aux algorithmes de ces systèmes d'intelligence artificielle. Bien qu'une énorme quantité de données ait déjà été introduite dans ces systèmes, il en reste encore à découvrir, et ces données peuvent également être générées par les systèmes eux-mêmes. Ainsi, compte tenu des « lois d'échelle », nous pouvons raisonnablement prévoir que ces systèmes continueront à s'améliorer, du moins jusqu'à ce que ces données soient épuisées.
« Nombreux sont ceux qui s'attendent à ce que l'IA soit un jour capable de réaliser toutes les tâches économiquement...
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