
mais certains considèrent DeepSeek comme le Linux du secteur de l'IA
La startup chinoise DeepSeek a réussi à développer des modèles d'IA très performants, comparables à GPT-4, avec des ressources bien moindres. Son efficacité a remis en question la nécessité d'investissements massifs dans les infrastructures d'IA, provoquant une baisse significative des actions de Nvidia en janvier 2025. Pour certains, DeepSeek rappelle l'avènement du noyau Linux. Mais un rapport du Congrès américain estime que DeepSeek représente une « menace profonde » pour la sécurité nationale les États-Unis. Selon le rapport, DeepSeek siphonne les données des Américains pour le compte de Pékin et s'appuie sur des « technologies américaines volées ».
Le rapport en question est l'œuvre de la commission bipartisane d'enquête sur le Parti communiste chinois (PCC) de la Chambre des représentants. Il accuse DeepSeek d'une série de pratiques subversives, illégales et immorales. En outre, le rapport montre que le géant technologique Nvidia s'attire également les foudres des représentants pour avoir prétendument fourni à DeepSeek les puces nécessaires à la création de grands modèles de langage (LLM).
La commission d'enquête affirme que DeepSeek est une arme de Pékin
« Le rapport est clair : DeepSeek n'est pas une simple application d'IA. C'est une arme dans l'arsenal du Parti communiste chinois, conçue pour espionner les Américains, voler notre technologie et subvertir la loi américaine », a déclaré le représentant John Moolenaar (R-MI), président de la commission. D'après lui, DeepSeek a exploité des modèles d'IA américains et a utilisé des puces Nvidia qui « n'auraient jamais dû se retrouver entre les mains du PCC ».
« L'innovation américaine ne devrait jamais être le moteur des ambitions de nos adversaires », a-t-il ajouté. Le rapport, intitulé « DeepSeek Unmasked: Exposing the CCP's Latest Tool for Spying, Stealing, and Subverting U.S. Export Control Restrictions », a été publié le 16 avril. Il comprend les affirmations suivantes :
- DeepSeek supprime activement plus de 85 % des réponses relatives aux droits de l'homme, à la démocratie, à Taïwan ou à Hong Kong ;
- DeepSeek est détenu et exploité par une société ayant un lien direct avec le PCC et idéologiquement aligné sur la pensée du président chinois Xi Jinping ;
- DeepSeek transmet au PCC des données sur des utilisateurs américains ;
- DeepSeek maintient une infrastructure liée à des entreprises chinoises utilisant la surveillance de masse, la collecte de données et la censure.
Le rapport cite une étude de Feroot Security selon laquelle les opérations de DeepSeek renvoient les données des Américains vers la Chine par le biais d'une « infrastructure dorsale connectée à China Mobile » et intègrent des outils de traçage provenant d'autres géants chinois de la technologie tels que ByteDance et Tencent. Ces controverses ont émergé à la suite du bouleversement provoqué par DeepSeek. Toutefois, la startup chinoise nie ces allégations.
La commission a décrit la société d'État China Mobile comme une entreprise « liée au secteur militaire » et ByteDance comme une entreprise « contrôlée par des adversaires étrangers », tandis que le département de la Défense, à travers le Pentagone, a désigné Tencent comme une entreprise militaire chinoise.
Outre les accusations susmentionnées, la commission établit aussi un lien entre des dizaines d'employés et de chercheurs de DeepSeek et l'Armée populaire de libération (APL), l'aile militaire du PCC. DeepSeek a déjà été interdit dans certains pays, dont l'Australie, l'Inde, l'Italie, la Corée du Sud et Taïwan, en raison de problèmes de sécurité potentiels. Son utilisation a été interdite par le Congrès, la NASA et des entités gouvernementales de l'État du Texas.
Nvidia interpelé pour avoir fourni des puces d'IA avancées à DeepSeek
Le rapport de la commission affirme que le fondateur de DeepSeek, Liang Wenfeng, supervise l'entreprise dans un « écosystème intégré » ayant des liens avec un distributeur de matériel lié à l'État et l'institut de recherche chinois Zhejiang Lab. Le rapport rappelle notamment le témoignage d'OpenAI (un rival de DeepSeek), qui a déclaré au comité que DeepSeek s'était probablement appuyé sur des techniques « illégales » pour entraîner ses modèles d'IA.
OpenAI a également déclaré que « les employés de DeepSeek avaient contourné les garde-fous » pour accélérer le développement à moindre coût, notamment en utilisant le modèle d'OpenAI pour aider à transformer les données d'entraînement ». DeepSeek s'est en effet appuyé sur une approche controversée appelée « distillation ». Pour rappel, la distillation est le processus de transfert de connaissances d'un grand modèle à un modèle plus petit.
Nvidia fait également l'objet d'accusations dans le rapport de la commission. « DeepSeek manipule secrètement les résultats de recherche pour les aligner sur la propagande chinoise et s'est appuyé sur des puces Nvidia dont l'exportation est restreinte », affirme la commission. Le rapport indique notamment :
- Nvidia a fourni à DeepSeek plus de 60 000 puces pour le développement de sa plateforme, en contournant éventuellement les réglementations en matière d'exportation ;
- Nvidia a développé une puce modifiée pour exploiter les failles des restrictions américaines à l'exportation, sous la direction de son PDG Jensen Huang.
Nvidia a déclaré en janvier dernier que DeepSeek utilise « des puces entièrement conformes au contrôle des exportations ». Un porte-parole de Nvidia, John Rizzo, a précédemment déclaré : « nous insistons pour que nos partenaires respectent toutes les réglementations et lois applicables et, si nous recevons des informations contraires, nous agissons en conséquence ». Toutefois, la déclaration de Nvidia n'est pas suffisante pour la commission du Congrès.
Elle accuse des pays comme Singapour et la Malaisie d'acheter des puces et de les exporter illégalement vers la Chine. Elle demande à Nvidia de fournir des détails spécifiques concernant chaque compte client de pas moins de 11 pays asiatiques. La commission attend la réponse de Nvidia dans les deux semaines.
DeepSeek est-il réellement contrôlé par le Parti communiste chinois ?
« DeepSeek représente une menace profonde pour la sécurité de notre nation. Bien qu'elle se présente comme un simple chatbot d'IA, un examen plus approfondi révèle que l'application siphonne des données vers la République populaire de Chine (RPC), crée des vulnérabilités en matière de sécurité pour ses utilisateurs et s'appuie sur un modèle qui censure et manipule secrètement des informations conformément à la loi chinoise », indique le rapport.
Les conclusions du rapport font l'objet de controverses. Selon certains critiques, la commission tente de décrédibiliser les progrès de DeepSeek. Ils estiment que les modèles de DeepSeek sont open source, ce qui facilite l'audit, le contrôle et les forks personnalisés, contrairement aux modèles fermés américains.

La rencontre avec Xi Jinping a marqué une approbation apparente pour l'entreprise, car DeepSeek est utilisé par certains bureaux gouvernementaux en Chine, tandis que les comités soutenus par le PCC et les services de police forment les travailleurs à l'utilisation de l'application. Les craintes ont été exacerbées après que Feroot Security a révélé que DeepSeek contient un code caché pouvant envoyer les informations de connexion de l'utilisateur à China Mobile.
Alors, DeepSeek sera-t-il interdit aux États-Unis ? La commission n'a pas recommandé l'interdiction de DeepSeek, mais a suggéré que les États-Unis mettent en place de nouveaux garde-fous à l'exportation et interdisent au gouvernement fédéral d'utiliser des modèles d'IA chinois. Un projet de loi bipartisan interdisant l'utilisation de DeepSeek sur les appareils fédéraux a été présenté à la Chambre des représentants en février, mais l'on ignore s'il sera soutenu.
DeepSeek suscite un grand engouement malgré les préoccupations
L'émergence des modèles d'IA plus petits et moins chers menace de bouleverser l'ensemble du secteur. Ils pourraient prouver que les grandes entreprises telles que Meta, OpenAI, Microsoft et Google n'ont pas besoin de dépenser des milliards pour former l'IA, tout en construisant des centres de données massifs remplis de milliers de GPU Nvidia. En témoigne la sortie de DeepSeek-R1, qui a provoqué la chute brutale des valeurs boursières liées à IA.
Meta, Google et Microsoft prévoient d'investir en 2025 des centaines de milliards de dollars dans l'infrastructure de l'IA, qui servira à former les modèles d'IA de la prochaine génération. Ce niveau d'investissement pourrait encore être nécessaire pour repousser les limites de l'innovation en matière d'IA.
Le fait que R1 soit open source permettra aux développeurs de s'en inspirer et d'apprendre de DeepSeek, voire de l'améliorer. La frénésie autour des modèles de DeepSeek a considérablement augmenté ces derniers mois. DeepSeek-R1 s'est hissé en tête du classement des applications les plus téléchargées de l'App Store d'Apple. De plus, Microsoft a érigé DeepSeek en modèle et a déclaré qu'il constitue son nouveau critère de réussite en matière d'IA.
Selon un rapport publié le mois dernier, DeepSeek a dépassé ChatGPT en matière de nouvelles visites mensuelles et est devenu l'outil d'IA à la croissance la plus rapide. Le rapport ajoute que DeepSeek a enregistré 524,7 millions de nouvelles visites en février 2025, contre les 500 millions pour ChatGPT. En outre, la part de marché de DeepSeek serait passée de 2,34 % à 6,58 % en février 2025, signe d'une acceptation croissante à l'échelle mondiale.
« Ce n'est pas juste un modèle, c'est un mouvement », a déclaré un défenseur de l'open source à propos de DeepSeek. Dans un climat où la course à l'IA est dominée par des entreprises, telles que Microsoft, OpenAI, Google, et Anthropic, l'apparition de DeepSeek est perçue comme une réplique communautaire, radicalement différente par sa philosophie : ouverture, collaboration, transparence. Malgré les craintes, DeepSeek suscite un grand engouement.
Conclusion
DeepSeek-R1 a rapidement gagné en popularité après son lancement aux États-Unis en janvier. DeepSeek a affirmé que son chatbot surpassait ses concurrents, y compris le ChatGPT d'OpenAI, et les analystes du secteur ont supposé que DeepSeek fonctionnait à une fraction du coût de ses rivaux américains. Le président américain Donald Trump a qualifié la publication de DeepSeek de « signal d'alarme » pour les entreprises technologiques américaines.
Les modèles de DeepSeek ont été critiqués pour leur refus de répondre à des questions sur des sujets controversés concernant la Chine, notamment sur les Ouïghours de Chine, le statut de Taïwan par rapport à la Chine et ce qui s'est passé sur la place Tiananmen en 1989. Ce qui est qualifié de censure.
Selon la commission d'enquête de la Chambre des représentants des États-Unis sur le PCC, « DeepSeek est un instrument secret de l'espionnage mondial et du programme d'appropriation des technologies du PCC ». Toutefois, certains critiques dénoncent un rapport politique à charge contre DeepSeek. Selon ces derniers, ce rapport est « une tentative désespérée de la commission pour dénigrer et rejeter les progrès de la Chine dans le domaine de l'IA ».
Source : rapport de la commission d'enquête sur le PCC (PDF)
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