
La plateforme d'apprentissage des langues Duolingo prend à fond le virage de l'IA. L'année dernière, Duolingo a été vivement critiqué après avoir licencié 10 % de ses sous-traitants au profit de l'IA. Aujourd'hui, l'entreprise affiche une volonté claire de réorienter ses produits et même son modèle économique autour de l'IA. Le PDG a déclaré que Duolingo cessera progressivement de faire appel à des travailleurs contractuels pour effectuer des tâches que l'IA peut prendre en charge. Bien qu'il s'agisse probablement de l'un des cas d'utilisation les plus pertinents de l'IA générative, c'est un coup dur pour le secteur de l'emploi humain.
Luis von Ahn, cofondateur et PDG de Duolingo, a récemment partagé avec le personnel un courriel dans lequel il annonce la nouvelle orientation de la plateforme. Le courriel a été publié sur le compte LinkedIn de Duolingo et informe que la plateforme se dirige vers un avenir centré sur l'IA. Dans le courriel, Luis von Ahn explique la raison d'être du pivot de Duolingo vers l'IA et en cite les avantages, bien que son annonce a déclenché une vague de critiques.
« Duolingo va devenir AI-first », a-t-il écrit. Cela signifie que l'entreprise va adopter l'IA comme pilier central de son développement. L'IA ne sera plus simplement un outil parmi d'autres, mais le point de départ de la conception de ses produits, de son expérience utilisateur et de son fonctionnement global.
Dans le cadre de cette initiative, Duolingo va procéder à quelques changements pour intégrer l'IA à ses processus internes. Ce sera frontal, puisque de nombreux emplois et contractuels seront directement remplacés par l'IA qui, selon le PDG, est bien plus intuitive, économique, mais surtout pratique. « L'IA modifie déjà la façon dont le travail est effectué. Lorsqu'il y a un changement aussi important, la pire chose à faire est d'attendre », écrit Luis von Ahn.
En outre, le recrutement ne se fera que si une équipe ne peut pas automatiser une plus grande partie de son travail. Selon Luis von Ahn, « l'une des meilleures décisions que nous ayons prises récemment a été de remplacer un processus de création de contenu lent et manuel par un processus basé sur l'IA ». Luis von Ahn considère l'IA générative comme une révolution et compare la vague actuelle de logiciels d'IA à l'essor des applications mobiles en 2012.

Par conséquent, il est possible que les programmes d'IA actuels et futurs remplacent une grande variété d'emplois, enrichissant ainsi les entreprises au détriment des travailleurs. Au cours de l'année 2023, le vif intérêt suscité par l'IA générative a conduit des groupes d'employés et des syndicats à se demander si les entreprises n'allaient pas utiliser cette technologie comme excuse pour réduire leurs effectifs. En effet, de nombreuses entreprises le font déjà.
En juillet 2023, la startup technologique indienne Dukaan a licencié 90 % de son personnel d'assistance et a introduit un chatbot d'IA pour répondre aux demandes d'assistance des clients. Dans une série de messages partagés sur Twitter, Suumit Shah, fondateur et PDG de Dukaan, a expliqué que le temps de traitement d'une demande d'assistance est passé de 2 heures et 13 minutes à 3 minutes et 12 secondes après l'introduction de l'assistant d'IA.
Les salariés de la Tech démoralisés face aux vagues de licenciements
Cette annonce intervient un an après que Duolingo a licencié 10 % de ses sous-traitants à la suite de l'adoption de l'IA pour les tâches de traduction. Un porte-parole de Duolingo avait déclaré à l'époque : « environ 10 % des contractants ont été débarqués. Nous n'avons tout simplement plus besoin d'autant de personnes pour effectuer le type de travail que certains de ces contractuels effectuaient ». La société a fait face à des critiques après cette décision.
Avec une adoption plus agressive de l'IA, elle vise à cesser progressivement de faire appel à des sous-traitants pour les tâches que l'IA peut prendre en charge. Mais Luis von Ahn affirme que « Duolingo restera une entreprise qui se soucie profondément de ses employés et qu'il ne s'agit pas de les remplacer par l'IA ».
Au lieu de cela, il affirme que Duolingo vise à « éliminer les goulets d'étranglement afin que les employés puissent se concentrer sur le travail créatif et les problèmes réels, et non sur les tâches répétitives ». « L'IA n'est pas seulement un stimulant de la productivité. Elle nous aide à nous rapprocher de notre mission. Sans l'IA, il nous faudrait des décennies pour adapter notre contenu à un plus grand nombre d'apprenants », indique le mémo de Luis von Ahn.
« Nous devons à nos apprenants de leur fournir ce contenu dès que possible », a-t-il ajouté. Le courriel de Luis von Ahn fait suite à un mémo similaire que le PDG de Shopify, Tobi Lütke, a envoyé aux employés et qui a récemment été partagé en ligne. Dans ce mémo, il a déclaré qu'avant que les équipes ne demandent plus d'effectifs ou de ressources, elles devaient montrer « pourquoi elles ne peuvent pas faire ce qu'elles veulent en utilisant l'IA ».
Ces derniers mois, le moral s'est effondré dans les rangs des salariés de la Tech. Les géants du secteur (Google, Amazon, Microsoft…) ont lancé d'importantes vagues de réductions d'effectifs, semant l'inquiétude chez les employés survivants. Anciennement choyés par de généreux avantages, ces derniers se retrouvent aujourd'hui à travailler plus et à craindre de figurer sur la prochaine liste de licenciement. Les chiffres illustrent l'ampleur du phénomène.
Selon le site Layoffs.fyi, qui suit les licenciements dans le secteur de la Tech, plus de 150 000 postes ont déjà été supprimés dans l'industrie en 2024, répartis sur près de 550 entreprises. La saignée se poursuit en 2025, avec plus de 22 000 emplois coupés dès le premier trimestre (dont 16 084 en février).
Conclusion
L'essor de l'IA générative a un impact considérable sur la main-d'œuvre humaine. De plus en plus d'entreprises remplacent tout ou partie de leur personnel par l'IA. Dans d'autres cas, certaines entreprises licencient pour réaffecter les ressources aux projets d'IA. Chez Duolingo, les employés contractuels de l'entreprise perdent leurs emplois au profit de l'IA et aucune embauche ne sera autorisée s'il n'est pas prouvé que l'IA ne peut pas faire le travail.
Pour le moment, cette décision ne concerne que la répartition interne des tâches et les utilisateurs de Duolingo ne devraient pas en faire les frais. La plateforme promet un enseignement plus naturel, adapté, plus de formations et de mentorat personnalisé, mais l'on ignore comment cela sera présenté dans l'application. Des critiques soulignent que les hallucinations de l'IA pourraient s'avérer un défi de taille et nuire à l'expérience des utilisateurs.
Une étude publiée l'année dernière a révélé que les grands modèles de langage (LLM) auront toujours des hallucinations et que nous devons nous en accommoder. Selon l'étude, les hallucinations des LLM découlent de leurs structures mathématiques et logiques fondamentales. En augmentant la complexité et la capacité des modèles, il est possible de réduire la fréquence de ces hallucinations, mais il serait impossible de les éliminer complètement.
Source : courriel de Luis von Ahn, PDG de Duolingo
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