
L'équipe Trump a dévoilé un plan d'action en matière d'IA qui vise à réduire le poids de la réglementation et les préjugés de la technologie. Le plan présente plus de 90 mesures politiques pour cette technologie en plein essor qui, d'après Washington, peuvent être mises en œuvre au cours de l'année prochaine. Il demande aux agences fédérales de revoir et d'abroger les politiques qui entravent le développement de l'IA, promet de construire une infrastructure de centres de données et de faire de l'Amérique le leader mondial dans le secteur. Le plan vise également à entraver davantage les efforts de la Chine en matière d'IA et d'innovation technologique.
Le nouveau projet de politique de l'administration Trump en matière d'IA préconise une réglementation limitée et une grande marge de manœuvre pour permettre aux géants de la technologie de se développer encore davantage. Certains observateurs le décrivent comme une « croisade contre les biais et la réglementation ». Il s'inscrit dans un effort plus large de déréglementation entrepris par l'administration Trump depuis son entrée en fonction.
Le plan d'action de l'administration Trump, long de 28 pages, a été dévoilé le 23 juillet et comporte plus de 90 mesures. Il s'agit d'un document très complet favorable à la Silicon Valley. « Nous pensons que nous sommes dans une course à l'IA », a expliqué David Sacks, responsable de l'IA à la Maison Blanche, lors d'une conférence téléphonique avant la publication du plan d'action. « Nous voulons que les États-Unis remportent cette compétition ».
Le Bureau de la politique scientifique et technologique a rédigé ce plan, qui s'articule autour de trois piliers clés pour la stratégie en matière d'IA : accélérer l'innovation dans le domaine de l'IA, mettre en place des infrastructures et mener une diplomatie et une politique de sécurité internationale de premier plan.
Supprimer la bureaucratie et réduire le poids de la réglementation
L'administration Trump donne la priorité à l'innovation en matière d'IA par rapport à la régulation. Le plan commence par souligner que « l'IA est bien trop importante pour être étouffée par la bureaucratie à ce stade précoce, que ce soit au niveau des États ou au niveau fédéral ». Il recommande une série de mesures visant à assouplir les réglementations et les contraintes qui pèsent sur les entreprises technologiques développant des produits d'IA.
Il appelle la Federal Communications Commission (FCC) à évaluer si les réglementations étatiques en matière d'IA interfèrent avec la capacité de l'agence à remplir ses obligations et à exercer ses pouvoirs en vertu de la loi sur les communications de 1934. L'administration veut se débarrasser des dogmes.
« Nous devons construire et entretenir une vaste infrastructure d'IA et l'énergie nécessaire pour l'alimenter. Pour ce faire, nous continuerons à rejeter les dogmes climatiques radicaux et les formalités administratives bureaucratiques, comme le fait l'administration depuis le jour de l'investiture. En termes simples, nous devons construire, construire, construire », indique le plan. Donald Trump a signé des décrets correspondant aux priorités définies.
Ce plan d'action vise explicitement à annuler les efforts entrepris par l'administration Biden, comme la révision de toutes les enquêtes que la précédente Commission fédérale du commerce (FTC) avait lancées afin de s'assurer qu'elles ne favorisent pas des théories de responsabilité qui pèsent indûment sur l'innovation en matière d'IA. Il s'appuie également sur l'approche précédemment adoptée par Donald Trump lors de sa première présidence.
Peu après l'entrée en fonction de Donald Trump, le vice-président JD Vance a prononcé un discours lors d'une réunion sur l'IA à Paris, où il a exposé les priorités de la nouvelle administration. « Nous pensons qu'une réglementation excessive du secteur de l'IA pourrait tuer une industrie transformative alors qu'elle est en plein essor, et nous ferons tout notre possible pour encourager des politiques favorables à la croissance de l'IA », a déclaré JD Vance.
JD Vance a poursuivi : « nous sommes convaincus que l'IA doit rester libre de tout biais idéologique et que l'IA américaine ne sera pas détournée pour servir d'outil de censure autoritaire ». Le plan d'action sur l'IA poursuit cette croisade contre l'IA « woke » en recommandant que « seules les entreprises d'IA qui garantissent que leurs systèmes sont objectifs et exempts de préjugés idéologiques descendants » se voient attribuer des contrats à l'avenir.
Promouvoir « l'IA » américaine sur le plan national et international
L'administration Trump a également pris des mesures pour aider à développer les capacités des États-Unis en matière d'IA au niveau national et international. Au lendemain de l'investiture de Donald Trump le 20 janvier dernier, le président a annoncé la création d'une coentreprise entre Softbank, Oracle et OpenAI. Elle est baptisée Stargate et vise à investir 500 milliards de dollars dans la construction de centres de données pour l'IA à travers tout le pays.
En mai 2025, Donald Trump et une délégation de dirigeants du secteur américain de la technologie se sont rendus dans plusieurs pays du Golfe pour annoncer une série d'accords portant sur la construction d'infrastructures d'IA dans la région. Cette stratégie vise à diffuser l'IA américaine dans cette région. La volonté de Donald Trump de promouvoir les intérêts américains en matière d'IA est aussi en train de remodeler la politique étrangère du pays.
L'administration Trump a présenté l'expansion des infrastructures et des investissements dans l'IA aux États-Unis comme un moyen de garder une longueur d'avance sur la Chine. « L'IA est une technologie révolutionnaire qui aura des répercussions profondes tant sur l'économie que sur la sécurité nationale. Il est tout simplement très important que l'Amérique continue d'être la puissance dominante dans le domaine de l'IA », a déclaré David Sacks.
Diverses organisations de sécurité, de protection des consommateurs et de la société civile ont déjà fait part de leurs inquiétudes concernant ce plan d'action. Sarah Myers West et Amba Kak, codirectrices exécutives de l'AI Now Institute, dénoncent ces mesures. Elles ont déclaré : « ce plan a été rédigé pour les intérêts des grandes entreprises technologiques qui investissent dans le développement de l'IA utilisée sur nous, et non par nous ».
« La position de l'administration donne la priorité aux intérêts des entreprises plutôt qu'aux besoins des citoyens ordinaires, qui sont déjà tous affectés par l'IA », a ajouté Sarah West. En 2023, le prédécesseur de Donald Trump, Joe Biden, a signé un décret exigeant des normes de sécurité et de sûreté régissant l'utilisation de l'IA au sein du gouvernement fédéral, décret qui a été abrogé par Donald Trump dès son premier jour au pouvoir en janvier.
Quelques jours plus tard, Donald Trump a signé un décret appelant à un développement accéléré de l'IA, à la suppression des préjugés idéologiques et au plan d'action actuel en matière d'IA, pour lequel il a sollicité l'avis du public. Le plan aurait été élaboré à partir de plus de 10 000 commentaires publics.
Déployer de nouveaux efforts pour freiner le secteur chinois de l'IA
L'administration Trump souhaite que la technologie d'IA américaine soit considérée comme leader du secteur tant sur le territoire national qu'à l'étranger. Mais elle ne souhaite pas non plus que les prouesses des États-Unis en matière d'IA renforcent ou encouragent un adversaire étranger. C'est un équilibre difficile à trouver. Selon les responsables, l'administration est encore en train de réfléchir à la meilleure marche à suivre pour atteindre ces objectifs.
Pour ce faire, le nouveau plan d'action de l'équipe Donald Trump mentionne le renforcement des contrôles à l'exportation des puces d'IA grâce à des « approches créatives », suivi de deux recommandations politiques. La première invite les organismes gouvernementaux, notamment le ministère du Commerce (DOC) et le Conseil national de sécurité, à collaborer avec le secteur de l'IA sur les fonctionnalités de vérification de l'emplacement des puces.
La seconde vise à mettre en place une initiative pour déterminer les mesures d'application des restrictions potentielles à l'exportation de puces ; elle mentionne que si les États-Unis et leurs alliés imposent des contrôles à l'exportation sur les principaux systèmes nécessaires à la fabrication de puces, ils ne se concentrent pas sur les sous-systèmes composants, ce qui laisse entendre où l'administration souhaite que le DOC porte son attention.
Les États-Unis souhaitent de travailler avec leurs alliés internationaux sur ce point. « Nous devons imposer des contrôles stricts à l'exportation. Et nous devons encourager nos partenaires et alliés à suivre les contrôles américains et à ne pas les contourner. S'ils le font, les États-Unis doivent utiliser des outils tels que la règle sur les produits directs étrangers et les droits de douane secondaires pour parvenir à un meilleur alignement international ».
Le plan n'explique pas la manière dont il compte mettre en place des alliances mondiales, coordonner avec les alliés les restrictions à l'exportation de puces ou collaborer avec les entreprises américaines spécialisées dans l'IA sur les fonctionnalités de vérification de l'emplacement des puces. Au lieu de cela, il définit les éléments fondamentaux nécessaires à l'élaboration de futures lignes directrices durables en matière d'exportation de puces d'IA.
Conclusion : les restrictions à l'exportation de puces vont prendre plus de temps. Et il existe de nombreuses preuves. Par exemple, l'administration Trump s'est contredite à plusieurs reprises au cours des derniers mois sur sa stratégie de restriction des exportations, y compris au cours de ce mois. Les restrictions américaines à l'exportation visent spécifiquement la Chine, qui est en passe de prendre le leadership mondial en matière d'innovation technologique.
L'administration Trump a du mal à mettre en œuvre ses restrictions
En juillet 2025, l'administration Trump a donné le feu vert à des sociétés de semiconducteurs, telles que Nvidia et AMD, pour commencer à vendre les puces d'IA qu'elles avaient développées pour la Chine. Cette décision est intervenue quelques mois seulement après avoir mis en place des restrictions de licence sur ces mêmes puces, qui ont effectivement poussé Nvidia à se retirer du marché chinois. L'équipe Trump a été accusée de naviguer à vue.
L'administration Trump a également officiellement abrogé la règle de diffusion de l'IA de l'administration Biden (qui limitait la capacité de calcul d'IA que certains pays sont autorisés à acheter) en mai, quelques jours avant son entrée en vigueur. Si le plan d'action sur l'IA de Donald Trump explique en détail comment développer le marché américain de l'IA à l'échelle mondiale tout en conservant sa position dominante, il reste vague sur les détails.
Selon certains, la mise en œuvre du plan de Donald Trump va démanteler la réglementation et accroitre le pouvoir des entreprises, mais ne protège pas les consommateurs. « Il est essentiel d'accélérer l'innovation, mais démanteler les garde-fous responsables risque de transformer la révolution américaine de l'IA en un pari imprudent », a déclaré Jim Secreto, ancien chef de cabinet adjoint de la secrétaire au Commerce de Joe Biden, Gina Raimondo.
« Promouvoir des exportations agressives d'IA sans contrôles raisonnables renforce la position de la Chine », a ajouté Jim Secreto. Au début du mois de juillet 2025, une disposition connue sous le nom de « moratoire sur l'IA » a été supprimée à la dernière minute du projet de loi controversé « Big Beautiful Bill » de Donald Trump. Ce retrait tardif est intervenu après une vague de critiques de la part des détracteurs des géants de la technologie.
Ce moratoire visait à limiter la réglementation étatique de l'IA pendant une décennie et avait été défendu par David Sacks. Le plan d'action sur l'IA ne recommande pas le rétablissement du moratoire, mais tente de limiter la manière dont les États tentent de contrôler les principaux acteurs de l'IA, en recommandant que les États ayant mis en place des réglementations « contraignantes » en matière d'IA se voient retirer leur financement fédéral.
Conclusion
Le plan d'action sur l'IA de Donald Trump est fortement aligné avec les intérêts des grandes entreprises technologiques, ce qui suscite des préoccupations. Il vise à supprimer les obstacles réglementaires, accélérer la construction d’infrastructures (centres de données, semiconducteurs, etc.) et renforcer la position américaine face à la Chine. Pour ses partisans, c’est une opportunité de reconquérir le leadership technologique mondial.
Selon Donald Trump et ses alliés, l’IA actuelle censure les opinions conservatrices. Ils citent des exemples comme des réponses biaisées de ChatGPT ou des systèmes de modération sur les réseaux sociaux. Ce plan vise à imposer des modèles d’IA supposés « neutres », mais en réalité alignés sur leur vision politique.
En adoptant cette logique, le gouvernement fédéral ne joue plus le rôle de régulateur protecteur, mais celui de catalyseur industriel et idéologique. L’IA devient un champ de bataille culturel et économique où le gouvernement fédéral prend position non pas pour encadrer la technologie, mais pour orienter sa trajectoire idéologique. Les critiques dénoncent ce plan d'action, affirmant qu'il s'agit d'une croisade contre la réglementation.
Source : plan d'action en matière d'IA de l'administration Trump (PDF)
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