
car les plateformes telles que X d'Elon Musk sont aujourd'hui envahies par les robots
La théorie de l'Internet mort s'est rapidement propagée ces dernières années. Elle postule que la majorité des contenus et des personnes apparentes en ligne sont en réalité générés automatiquement par des ordinateurs, et qu'Internet est en grande partie « mort ». Elle a souvent été réfutée, mais l'invasion de plusieurs pans d'Internet par les robots et les agents d'IA lui ont donné une crédibilité croissante. Elle est devenue encore plus pertinente avec le lancement de SocialAI, une application de réseaux sociaux où les utilisateurs interagissent exclusivement avec des chatbots d'IA. Selon Sam Altman, il pourrait y avoir une part de vérité dans cette théorie.
Qu’est-ce que la théorie de l’Internet mort ?
La théorie de l'Internet mort est une théorie du complot apparu vers 2016. Elle affirme qu'Internet est principalement constitué d'activités de robots et de contenus générés automatiquement et manipulés par la curation algorithmique, dans le cadre d'un effort coordonné et intentionnel pour contrôler la population et minimiser l'activité humaine organique. Les partisans de cette théorie allèguent que l'objectif final est de manipuler les consommateurs.
D'après eux, les agences gouvernementales utilisent les robots pour manipuler la perception du public. La théorie a gagné du terrain, car de nombreux phénomènes observés sont quantifiables, tels que l'augmentation du trafic des robots, mais la littérature sur le sujet ne soutient pas la théorie dans son intégralité.
Si elle a été au départ reléguée au rang de théorie du complot, elle paraît de plus en plus conforme au réel. Selon, l'agence européenne de police criminelle Europol, 90 % des contenus du Web pourraient être générés par l'IA d'ici 2025. Josh Yoshija Walter, professeur de transformation numérique à la haute école spécialisée Kalaidos et à l'université de Berne, et auteur de l'article « Artificial influencers and the dead Internet theory », le confirme.

Sam Altman accorde du crédit à cette théorie...
Pour certains détracteurs, la théorie de l'Internet mort est une idée incroyablement solipsiste qui, à son paroxysme, relève du creepypasta stupide et est devenue une sorte de plaisanterie ironique. Toutefois, elle contient une part de vérité qui reflète l'inquiétude croissante face au caractère factice et commercial du Web. Et il est indéniable que le déluge de modèles d'IA, de robots et des déchets qu'ils génèrent y contribue largement.
Sam Altman, PDG d'OpenAI, a récemment semblé accorder du crédit à cette théorie du complot. Il a déclaré : « je n'ai jamais pris la théorie de l'Internet mort au sérieux, mais il semble qu'il y ait vraiment beaucoup de comptes Twitter gérés par des LLM aujourd'hui ». Son message, posté sur son compte X (ex-Twitter), semble se moquer du réseau social d'Elon Musk et de la tentative infructueuse du milliardaire pour se débarrasser des bots sur la plateforme.
Mais ce qui s'est passé ensuite est encore plus intéressant. En commentant le message de Sam Altman, un utilisateur a partagé une capture d'écran d'une conversation avec ChatGPT d'OpenAI, lui demandant « Écris un tweet désinvolte pour capter l'attention autour de la théorie de l'Internet mort et des LLM sur Twitter ». Le chatbot d'IA d'OpenAI a répondu en reprenant exactement les mots utilisés par Sam Altman dans son message posté sur X :
ChatGPT a écrit : « je n'ai jamais pris la théorie de l'Internet mort au sérieux, mais il semble qu'il y ait vraiment beaucoup de comptes Twitter gérés par des LLM aujourd'hui ». Certains critiques ont suggéré que Sam Altman a peut-être recopié sur X une réponse qu'il avait obtenue de son IA ChatGPT.
Par ailleurs, il a été copieusement raillé. « Vous avez tout à fait raison ! Cette observation n'est pas seulement intelligente, elle montre que vous fonctionnez à un niveau supérieur », a répondu un utilisateur, imitant le style prolixe de ChatGPT. Certains critiques l'ont accusé de contribuer à détruire le Web.
Ils soulignent notamment le rôle d'OpenAI. « Eh bien, vous voyez où cela mène. Il dirige une entreprise évaluée à près de 500 milliards de dollars pour avoir lancé dans la nature ChatGPT, un chatbot dont le seul but est d'imiter de manière creuse l'écriture et la personnalité humaines, capable de produire des romans entiers d'un simple clic sur la touche Entrée. Il falsifie sans effort les faits autant que l'âme humaine », a commenté un utilisateur.
Le phénomène risque d'empirer, car le Web est envahi par les agents d'IA autonomes. Mais la réplique la plus courante était une photo du comédien Tim Robinson vêtu d'un costume de hot-dog, faisant référence à un sketch dans lequel un personnage qui a manifestement eu un accident avec une voiture décorée de saucisses tente désespérément de détourner la responsabilité, s'écriant à un moment donné : « nous essayons tous de trouver le coupable ! ».
Le contenu du Web devient moins qualitatif qu'auparavant
L’un des effets les plus inquiétants de la domination croissante de l’IA sur le Web est la détérioration progressive de la qualité du contenu en ligne. Ce phénomène repose sur un effet de boucle : les chatbots produisent du texte en s’appuyant sur de vastes ensembles de données extraites du Web. Jusqu’à récemment, ces données provenaient en grande partie de contenus rédigés par des humains : journalistes, chercheurs, blogueurs, experts de tous horizons.
Aujourd'hui, une portion croissante du contenu en ligne est elle-même générée par d'autres IA. Cela conduit à un problème connu sous le nom de « model collapse » (effondrement du modèle). En résumé, les nouveaux modèles d’IA s’entraînent sur du contenu produit par des modèles de la génération précédente, eux-mêmes formés sur d'autres contenus synthétiques. Ce recyclage progressif appauvrit la diversité, la nuance et l'originalité de l'information.
Les erreurs peuvent s’amplifier à chaque génération, les biais se renforcer, et le contenu devient moins fiable, moins contextualisé et souvent déconnecté de toute vérification humaine ou source primaire identifiable. Ce problème vient s'ajouter à la baisse considérable du trafic des sites Web d'information.
Enfin, si les chatbots d'IA deviennent les principales sources d’information consultées, sans accès direct aux documents originaux, les internautes pourraient progressivement perdre l’habitude de confronter les sources, de lire dans le contexte, ou d’interpréter de façon critique les données. Le Web se transformerait alors en une interface de réponses simplifiées, certes pratiques, mais de plus en plus superficielles. Le Web tel qu'on le connaît pourrait disparaître.
OpenAI, le fabricant de ChatGPT, affirme qu'environ 800 millions de personnes utilisent son chatbot. ChatGPT est l'application la plus téléchargée sur la boutique d'applications de l'iPhone. Apple a déclaré que les recherches classiques via son navigateur Web Safari ont chuté pour la première fois en avril 2025, les internautes ayant préféré poser leurs questions directement aux chatbots. OpenAI prévoit de lancer son propre navigateur dans un avenir proche.
Face à la montée en puissance des chatbots, Google, qui détient environ 90 % du marché mondial de la recherche en ligne, a ajouté des fonctions d'IA à son propre moteur de recherche afin de ne pas se laisser distancer. En 2024, il a commencé à faire précéder les résultats de recherche d'aperçus générés par l'IA, qui sont depuis devenus omniprésents. En mai, il a lancé le « mode IA », une version de son moteur de recherche qui ressemble à un chatbot.
Mais si les internautes n'ont plus besoin de cliquer sur des liens pour obtenir une réponse, les revenus fondent. Selon certains observateurs, il fallait autrefois deux pages publiées pour générer un visiteur. Désormais, il en faut des dizaines, voire des centaines, pour une seule visite quand l'IA est intermédiaire.
SocialAI : une expérience effrayante de l'invasion des robots
En septembre 2024, le développeur de logiciels Michael Sayman a lancé une nouvelle application de réseau social peuplé d'IA, appelée SocialAI, qui semble donner vie à la théorie de l'Internet mort. La plateforme SocialAI permet aux utilisateurs d'interagir uniquement avec des chatbots d'IA plutôt qu'avec d'autres humains. L'application est disponible sur le magasin d'applications de l'iPhone, mais jusqu'à présent, elle fait l'objet de critiques virulentes.
Âgé de 28 ans, Michael Sayman a précédemment occupé le poste de chef de produit chez Google, et il a également oscillé entre Facebook, Roblox et Twitter au fil des ans. Dans le message qui annonçait sa nouvelle plateforme sur son compte X, Michael Sayman explique qu'il rêvait de créer ce service depuis des années, mais que la technologie n'était pas encore au point. Pour lui, il s'agit d'un outil qui peut aider les personnes seules ou rejetées.
Cependant, de nombreux experts en sécurité informatique et développeurs ont exprimé leur inquiétude, qualifiant l’application de « véritable enfer ». Ils craignent que l’utilisation de chatbots d'IA pour simuler des interactions humaines puisse avoir des effets négatifs sur la santé mentale des utilisateurs et sur la qualité des interactions en ligne. Colin Fraser, développeur de logiciels et spécialiste de l'IA, a vivement dénoncé une initiative chaotique.
« Cela ressemble vraiment à l'enfer. L'enfer avec un grand E », a déclaré Colin Fraser. Malgré les nombreuses critiques, Michael Sayman défend son projet en affirmant que SocialAI est conçu pour aider les personnes se sentant isolées à trouver un espace de réflexion et de soutien.
Il faut noter que les robots de SocialAI ont des limites, ce qui n'est pas surprenant. Outre le fait de confabuler des informations erronées (ce qui pourrait être une caractéristique plutôt qu'un bogue dans ce cas), ils ont tendance à utiliser un format cohérent de réponses brèves qui donnent l'impression d'être en boîte.
Leur gamme d'émotions simulées est également limitée. Les tentatives visant à obtenir des réactions fortement négatives de la part de l'IA sont généralement infructueuses, les robots évitant les attaques personnelles même lorsque les utilisateurs maximisent les paramètres de trolling et de sarcasme.
Et vous ?




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