La Virginie, où se situe le Data Center Alley, le plus grand marché de centres de données nord-américain, compte aujourd'hui plus de 250 centres de données hyperscales et environ 80 nouvelles installations y ont été ajoutées depuis 2019. Dominion Energy, la compagnie d’électricité qui dessert la région, s’attend à ce que la demande sur son territoire augmente de 5 % par an au cours des 15 prochaines années, pour atteindre presque le double de son volume de production actuel.
Pour s’y préparer, la compagnie a investi dans la construction d’un important parc éolien et a été contrainte de suspendre temporairement les nouvelles connexions de centres de données en 2022. Mais Dominion envisage également la possibilité de retarder la mise à la retraite d’une grande centrale au charbon, ainsi que de plusieurs centrales au gaz naturel.
Dans le Kansas, la compagnie d’électricité Evergy a indiqué dans un communiqué publié en juin 2023 qu’elle maintiendrait en service une centrale au charbon vieille de plus de soixante ans, jusqu’en 2028. Cette décision a été prise en réponse à la construction d’un nouveau centre de données géré par Meta Platforms Inc. Selon le directeur général d’Evergy, David Campbell, ce projet, ainsi que le développement économique de la région, alimentent les "plus fortes croissances de la demande d’électricité depuis des décennies".
Ce ralentissement de la fermeture des vieilles centrales au charbon s’observe au niveau de tout le territoire américain. America’s Power, un groupement de professionnels de l’industrie du charbon, a indiqué que près de deux douzaines d’installations fonctionnant au charbon, allant du Kentucky au Dakota du Nord, et dont la fermeture était prévue entre 2022 et 2028, seront maintenues en activité au-delà de cette période.
Par ailleurs, la hausse de la demande d’énergie des centres de données ne se limite désormais plus à des régions spécifiques, mais s’étend à l’échelle nationale. Selon le Boston Consulting Group, la consommation d’électricité des centres de données américains devrait tripler par rapport aux niveaux de 2022, d’ici la fin de la décennie. Cette consommation serait alors équivalente à environ 7,5 % de la demande d’énergie prévue pour l’ensemble du pays.
Ces prévisions n’intègrent pas encore les ajustements radicaux dus à l’adoption de l’IA et la quantité d’électricité réellement nécessaire pour soutenir l’activité de la technologie reste à ce jour floue. Toutefois, tout laisse présager que l’IA entraînera une augmentation nette de la demande en énergie au fur et à mesure qu’elle gagnera en maturité.
"Nous n’avons pas encore pris la mesure des besoins énergétiques de cette technologie", a indiqué Sam Altman, PDG d’OpenAI, lors du Forum économique mondial de Davos, en janvier dernier. "Nous avons besoin de beaucoup plus d’énergie dans le monde que nous ne le pensions auparavant".
En effet, la consommation énergétique des centres de données d’IA diffère considérablement de celle des centres de données traditionnels, car ils sont équipés d’unités de traitement graphique (GPU) énergivores spécialement conçues pour exécuter les charges de travail d’IA, en particulier celles relatives à l’IA générative.
Selon une étude universitaire menée par Alex de Vries, candidat au doctorat à la School of Business and Economics de VU Amsterdam, l’utilisation d’une IA générative telle que ChatGPT dans chaque recherche Google nécessiterait plus de 500 000 serveurs A100 HGX de Nvidia, soit un total de 4,1 millions de GPU. À raison d’une demande d’énergie de 6,5 kW par serveur, cela entraînerait une consommation quotidienne d’électricité de 80 GWh et une consommation annuelle de 29,2 TWh.
Alors que la demande énergétique de l’IA continue de croître, les experts soulignent l’importance d’adapter le réseau d’énergie pour qu’il puisse accueillir efficacement les sources d’énergie alternatives et mettent en garde sur le fait que la production d’électricité à partir de combustibles fossiles pourrait entraver les progrès vers un avenir énergétique plus durable.
"Le pire scénario est que les services publics ne s’adaptent pas et maintiennent en ligne les anciennes capacités de production de combustibles fossiles et qu’ils n’évoluent pas au-delà", a déclaré Ari Peskoe, directeur de l’Electricity Law Initiative à la faculté de droit de Harvard.
S’exprimant lors d’un événement en marge du Forum économique mondial de Davos, le PDG d’OpenAI, Sam Altman, a déclaré que l'IA du futur aura besoin d’une percée énergétique. Il a souligné l’importance de sources d’énergie respectueuses du climat, et a indiqué que la fusion nucléaire, l’énergie solaire et le stockage étaient la voie à suivre pour l’intelligence artificielle.
De son côté, Microsoft envisage également d’utiliser l’énergie nucléaire pour alimenter ses futurs projets d’intelligence artificielle. Le géant de la technologie a indiqué être en train de former une IA pour simplifier les procédures réglementaires nécessaires à la construction de centrales nucléaires. La société, inspirée par les convictions de son fondateur Bill Gates, qui soutient les sources d’énergie sans émission de carbone, voit plus de potentiel dans le nucléaire que dans d’autres sources d’énergie renouvelables.
Sources : Dominion Energy; Evergy, Inc.; America's Power; Boston Consulting Group
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Voir aussi :
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