
Le service de streaming français Deezer a indiqué dans un récent billet de blog qu'il recevait désormais quotidiennement plus de 20 000 titres entièrement générés par l'intelligence artificielle (IA), ce qui représente 18 % de son contenu téléchargé quotidiennement, soit près du double de ce qu'il avait indiqué en janvier 2025.
Cette révélation de Deezer intervient dans un contexte où les préoccupations du secteur musical à l'égard de l'IA ne cessent de s'intensifier. Une étude de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et de compositeurs a notamment avertit que les professionnels de l'industrie musicale pourraient perdre jusqu'à 25 % de leurs revenus au profit de l'IA d'ici quatre ans. Le rapport, présenté comme la première analyse économique de l'impact de l'IA générative (GenAI) sur le travail créatif, souligne en outre que le marché de la GenAI connaîtra une forte expansion, passant de 3 milliards d'euros en 2024 à 64 milliards d'euros par an d'ici à 2028.
Deezer est, rappelons-le, une plateforme française de distribution numérique dédiée à l'écoute de musique en streaming lancée en août 2007. Le service permet l'écoute de musiques et podcasts, issus d'un catalogue négocié avec les labels regroupant plus de 120 millions de titres en 2024. Deezer éditorialise son contenu par l'établissement de playlists ainsi que son algorithme Flow, qui recommande de nouveaux morceaux selon les goûts musicaux de l’utilisateur.
En janvier dernier, Deezer a lancé un nouvel outil de détection de l'IA pour tenter de concilier les intérêts des créateurs humains et le nombre croissant de morceaux générés par l'IA et téléchargés sur le service. Lors du lancement de l'outil, Deezer a déclaré avoir découvert qu'environ 10 000 morceaux entièrement générés par l'IA étaient téléchargés chaque jour sur la plateforme. Au lieu d'interdire ces titres entièrement générés par l'IA, Deezer utilise son outil de détection de l'IA pour les supprimer de son algorithme de recommandation et de sa liste de lecture éditoriale, ce qui signifie que les utilisateurs peuvent toujours trouver de la musique générée par l'IA s'ils le souhaitent, mais qu'elle ne sera pas promue auprès d'eux.
Il se pourrait même que cet outil sous-estime le nombre de morceaux générés par l'IA sur Deezer. Lors de son lancement, Deezer a indiqué que l'outil pouvait détecter la musique entièrement générée par l'IA à partir de certains modèles. Cela inclut Suno et Udio, deux des modèles musicaux d'IA les plus populaires sur le marché aujourd'hui, « avec la possibilité d'ajouter des capacités de détection pour pratiquement n'importe quel autre outil similaire tant qu'il y a un accès à des exemples de données pertinentes », comme ils le disent. Il est toutefois possible qu'il y ait plus de musique générée par l'IA que ce que l'outil peut actuellement détecter.
En outre, l'outil de Deezer ne détecte ni ne pénalise les œuvres partiellement générées par l'IA, qui constituent probablement une part importante des chansons influencées par l'IA à ce jour. Selon les directives de l'Office américain du droit d'auteur, tant qu'« un auteur humain a déterminé des éléments expressifs suffisants », une œuvre assistée par l'IA peut bénéficier d'une protection par le droit d'auteur.
Deezer est l'un des premiers services de streaming à mettre en place une politique contre les chansons entièrement générées par l'IA, et le premier à signaler la fréquence à laquelle elles sont téléchargées sur le service. Comme Billboard l'a signalé en février, la plupart des DSP n'ont pas de politique spécifique à l'IA, SoundCloud étant le seul autre service de streaming à avoir déclaré publiquement qu'il pénalisait la musique générée par l'IA. Sa politique consiste à « interdire la monétisation de chansons et de contenus exclusivement générés par l'IA, en encourageant les créateurs à utiliser l'IA comme un outil plutôt que comme un substitut à la création humaine ».
Toutefois, d'autres services de diffusion en continu ont pris des mesures pour s'assurer que certains des effets négatifs de l'IA sont contrôlés, même si leurs politiques ne sont pas spécifiques à l'IA. Par exemple, Spotify, YouTube Music et d'autres ont mis en place des procédures permettant aux utilisateurs de signaler les usurpations d'identité et de voix, un des risques majeurs posé par l'IA. Spotify surveille également les utilisateurs qui polluent la plateforme avec un trop grand nombre de téléchargements simultanés, une tactique utilisée par de mauvais acteurs qui tentent d'obtenir des redevances supplémentaires pour la diffusion en continu. Cela se fait souvent en déployant des titres générés rapidement par l'IA, mais ce n'est pas toujours le cas.
« Les contenus générés par l'IA continuent d'inonder les plateformes de streaming comme Deezer, et nous ne voyons aucun signe de ralentissement », a déclaré Aurélien Hérault, directeur de l'innovation chez Deezer, dans un communiqué. « L'IA générative a le potentiel d'avoir un impact positif sur la création et la consommation de musique, mais nous devons aborder le développement avec responsabilité et prudence afin de préserver les droits et les revenus des artistes et des auteurs-compositeurs, tout en maintenant la transparence pour les fans. Grâce à notre outil de pointe, nous retirons déjà des recommandations algorithmiques les contenus entièrement générés par l'IA. »
La tendance actuelle vers la musique générée par l'IA ne se limite plus aux plateformes de streaming telles que Deezer. En septembre 2024, le cinéaste indien Ram Gopal Varma (RGV) a annoncé qu'il utiliserait exclusivement de la musique générée par l'IA dans ses futurs projets, renonçant ainsi à faire appel à des musiciens humains. La décision, révélée lors d'un entretien avec un média technologique populaire, accompagne le lancement de RGV Den Music, une société dédiée à la production de bandes sonores, de musiques d'ambiance et d'effets audio basés sur l'IA.
Source : Deezer
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